L’ingénu, Voltaire, 1767
L’Ingénu faisait des progrès rapides dans les sciences, et surtout dans la science de l’homme. La cause du développement rapide de son esprit était due à son éducation sauvage presque autant qu’à la trempe de son âme : car, n’ayant rien appris dans son enfance, il n’avait point appris de préjugés. Son entendement, n’ayant point été courbé par l’erreur, était demeuré dans toute sa rectitude. Il voyait les choses comme elles sont, au lieu que les idées qu’on nous donne dans l’enfance nous les font voir toute notre vie comme elles ne sont point. « Vos persécuteurs sont abominables, disait-il à son ami Gordon. Je vous plains d’être opprimé, mais je vous plains d’être janséniste. Toute secte me paraît le ralliement de l’erreur. Dites-moi s’il y a des sectes en géométrie ?
-- Non, mon cher enfant, lui dit en soupirant le bon Gordon ; tous les hommes sont d’accord sur la vérité quand elle est démontrée, mais ils sont trop partagés sur les vérités obscures.
-- Dites sur les faussetés obscures. S’il y avait eu une seule vérité cachée dans vos amas d’arguments qu’on ressasse depuis tant de siècles, on l’aurait découverte sans doute ; et l’univers aurait été d’accord au moins sur ce point-là. Si cette vérité était nécessaire comme le soleil l’est à la terre, elle serait brillante comme lui. C’est une absurdité, c’est un outrage au genre humain, c’est un attentat contre l’Être infini et suprême de dire : Il y a une vérité essentielle à l’homme, et Dieu l’a cachée. »
Tout ce que disait ce jeune ignorant, instruit par la nature, faisait une impression profonde sur l’esprit du vieux savant infortuné.
– Essai de définition
Fontaine Philippe, « Qu’est-ce que la science ? De la philosophie à la science : les origines de la rationalité moderne », Recherche en soins infirmiers, 2008/1 (N° 92), p. 6-19. DOI : 10.3917/rsi.092.0006. URL : https://www.cairn.info/revue-recherche-en-soins-infirmiers-2008-1-page-6.htm
– Voir et savoirs Daniel Arasse
INTERPRÉTER L’ART : ENTRE VOIR ET SAVOIRS
Réalisation : 12 juillet 2001 - Mise en ligne : 31 janvier 2018
Pour deux raisons au moins, la présence de l’histoire de l’art dans un cycle consacré aux renouvellements de l’observation dans les sciences a de quoi surprendre. La première tient au statut scientifique de l’histoire de l’art : même si elle veut souvent se donner l’aspect d’une discipline scientifique en reprenant les protocoles d’énoncé des sciences dites exactes, l’histoire de l’art n’est pas la science de l’art (traduction imparfaite de l’allemand Kunstwissenschaft) et, si on doit la compter au nombre des sciences humaines (ce que ne fait pas Lévi-Strauss), elle est la science des comportements artistiques humains , une science des pratiques artistiques dont les critères de scientificité sont loin d’être établis. Par ailleurs, le terme d’observation n’est jamais employé par les historiens de l’art pour qualifier leur relation avec les oeuvres : ils parlent d’étude, d’analyse, ils regardent les oeuvres plus qu’ils ne les observent, et la relation du regardant à l’oeuvre est traditionnellement considérée comme une relation de contemplation - et non d’observation. Parler d’observation de l’oeuvre d’art par son historien revient donc à opérer un glissement sémantique significatif. Malgré les réserves qu’il ne manquerait pas de susciter chez les spécialises attachés à préserver l’aura de l’oeuvre d’art, ce glissement est légitime : il enregistre et met en lumière une transformation effective de notre relation de regard avec les oeuvres d’art. L’historien se doit d’en être conscient et le spectateur non professionnel la subit à son insu.
Cette transformation est liée au renouvellement des conditions de perception des oeuvres d’art : mise au point de techniques et de dispositifs spécifiques pour l’étude scientifique des oeuvres comme objets matériels ; conditions dans lesquelles les oeuvres sont présentées au regard - exposition muséale et reproduction technique sous forme, entre autres, photographique, radiographie, photographie à l’infrarouge ou l’ultraviolet, microprélèvement de pigments, etc., ces dispositifs et instruments techniques apportent à l’historien, depuis de nombreuses décennies, des informations parfois décisives sur l’histoire matérielle des oeuvres, sur leur authenticité ou leur genèse, dissimulée dans l’oeuvre finale.
On abordera rapidement cet aspect du renouvellement de l’observation de l’art pour s’attarder davantage sur les transformations que connaît la perception normale des oeuvres du fait des conditions de présentation qui sont désormais les leurs. Après avoir évoqué le caractère anachronique de ces conditions de présentation par rapport aux modes initiaux, historiques, de réception des oeuvres, après avoir aussi rappelé comment l’historien se doit de percevoir cet anachronisme pour éviter les effets pervers, on insistera, à l’aide de plusieurs exemples, sur les nouvelles problématiques proprement historiques, que ce même anachronisme suscite en confrontant le voir renouvelé de l’historien à ses savoirs établis. Conditions muséales d’exposition et reproduction photographique permettent en particulier d’observer les oeuvres de la distance à laquelle elles ont été réalisées et de percevoir des éléments qui n’ont pas été peints pour être vus, peints pour ne pas être vus.
Parmi les enjeux scientifiques de ce renouvellement de l’observation, on insistera en particulier sur la mise au point de nouveaux modèles théoriques permettant de constituer une microhistoire de l’art - dont un des principes pourrait être, précisément, la confrontation dialectique du voir et des savoirs. Tout en suggérant l’existence de modes de diffusion et de connaissance des images dont on ne peut trouver trace ailleurs, cette microhistoire ouvrirait, entre autres, la possibilité d’une histoire de la relation intime de l’artiste à son travail et de ses modes d’expression dans l’oeuvre, relation au travers de laquelle se préfigure et se configure le sujet classique
Évènements à venir
30
avril
2024
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne/ISJPS, espace Gisèle Halimi, 1 rue de la Glacière, 75013 Paris
10h00 -
12h00
30
avril
2024
Centre Broca, 21 rue de Broca, bâtiment A, 7ème étage, salle A701
18h00 -
20h00
02
mai
2024
salle de Formation de la Bibliothèque de la Sorbonne (17 rue de la Sorbonne, 75005 Paris)
14h00 -
16h00
+ 13 juin
03
mai
2024
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 14 rue Cujas, galerie Dumas - Salle Jean-Baptiste Duroselle,
11h00 -
18h00
03
mai
2024
UFR de Philosophie, en salle Lalande
18h00 -
20h00
04
mai
2024
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 17 rue de la Sorbonne, Paris 5e - salle Lalande (esc. C , 1er étage à droite)
10h30 -
12h30
+ 1er juin
04
mai
2024
Lieu : Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, UFR de philosophie, 17 rue de la Sorbonne, Paris 5e, escalier C, 1er étage, droite, salle Lalande
15h00 -
18h00
+ 1er juin
06
mai
2024
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 17 rue de la Sorbonne, Paris 5e - BIS - salle de formation
17h00 -
19h30
+ 13 mai
+ 13 juin
06
mai
2024
ENS, 45 rue d’Ulm, 75005 Paris
17h00 -
19h00
10
mai
2024
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, centre Lourcine 1 rue de la Glacière, 75013 Paris Bâtiment 1 Suzanne Bastid, 2e étage, salle 13
16h00 -
18h00
+ 14 juin
14
mai
2024
Campus Condorcet : Humatech – ligne 12, arrêt Front populaire. Cours des humanités. Salle 2.14 Campus Port-Royal : centre Lourcine, 1 rue de la Glacière, 75013 Paris. Salle 13 au 2e étage
10h00 -
12h30
+ 28 mai
14
mai
2024
Salle Cavaillès, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (17 Rue de la Sorbonne, 75005, Paris)
18h30 -
20h30
+ 4 juin
15
mai
2024
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 17 rue de la Sorbonne, Paris 5e - salle Lalande (esc. C , 1er étage à droite)
14h00 -
16h00
+ 12 juin
15
mai
2024
l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne, en salle Halbwachs, escalier C, 1er étage droite, 17 rue de la Sorbonne, 75005 Paris
19h00 -
21h00
16
mai
2024
Maison de la recherche de la Sorbonne, 28 rue Serpente, salle D116
14h30 -
18h30
+ 6 juin