La philosophie dans l’académie de CRETEIL
Slogan du site
Travail et technique

**Point de méthode :Expliquer un texte

Simondon

++++Du mode d’existence des objets techniques

Jusqu’à ce jour, la réalité de l’objet technique a passé au second plan derrière celle du travail humain. L’objet technique a été appréhendé à travers le travail humain, pensé et jugé comme instrument, adjuvant, ou produit du travail. Or, il faudrait, en faveur de l’homme même, pouvoir opérer un retournement qui permettrait à ce qu’il y a d’humain dans l’objet technique d’apparaître
directement, sans passer à travers la relation de travail. (…)
Le travail est ce par quoi l’être humain est médiateur entre la nature et l’humanité comme espèce. (…). Au contraire, par l’activité technique, l’homme crée des médiations, et ces médiations sont détachables de l’individu qui les produit et les pense ; l’individu s’exprime en elles, mais n’adhère pas à elles ; la machine possède une sorte d’impersonnalité qui fait qu’elle peut devenir instrument pour un autre homme ; la réalité humaine qu’elle cristallise en elle est aliénable, précisément parce qu’elle est détachable.
Le travail adhère au travailleur, et réciproquement, par l’intermédiaire du travail, le travailleur adhère à la nature sur laquelle il opère. L’objet technique, pensé et construit par l’homme, ne se borne pas seulement à créer une médiation entre homme et nature ; il est un mixte stable d’humain et de naturel, il contient de l’humain et du naturel ; il donne à son contenu humain une structure semblable à celle des objets naturels, et permet l’insertion dans le monde des causes et des effets naturels de cette réalité humaine. La relation de l’homme à la nature, au lieu d’être seulement vécue et pratiquée de manière obscure, prend un statut de stabilité, de consistance, qui fait d’elle une réalité ayant ses lois et sa permanence ordonnée. L’activité technique, en édifiant le monde des objets techniques et en généralisant la médiation objective entre homme et nature, rattache l’homme à la nature selon un lien beaucoup plus riche et mieux défini que celui de la réaction spécifique de travail collectif. Une convertibilité de l’humain en naturel et du naturel en humain s’institue à travers le schématisme technique.
Gilbert Simondon, Du mode d’existence des objets techniques, p.241/245.

1. Dégagez l’idée principale du texte et expliquez les différentes étapes de
son argumentation.
2. Expliquez, en vous aidant du texte, les expressions suivantes :
 « L’objet technique, pensé et construit par l’homme, ne se borne pas
seulement à créer une médiation entre homme et nature ; il est un mixte
stable d’humain et de naturel »
 « Au contraire, par l’activité technique, l’homme crée des médiations, et
ces médiations sont détachables de l’individu qui les produit et les pense »
3. Quelle différence l’auteur fait-il entre le travail et l’activité technique ?
4. Essai : L’activité technique est-elle une aliénation de la pensée humaine ?

**Point de méthode : Exemple de dissertation

L’artiste travaille-t-il ? vidéo

Problématisation :
Magali LOMBARD, Professeur de philosophie au Lycée Van GOGH d’Ermont
Cours interactif de philosophie donné dans le cadre du Projet Europe, Éducation, École
Diffusion en visioconférence le 20 novembre 2014,
En différé : http://www.dailymotion.com/projeteee

L’ARTISTE TRAVAILLE-T-IL ?
Il est assez habituel de considérer que les productions de l’art, les oeuvres d’art, ne sont pas à mettre sur le même plan que tout ce que l’homme produit par ailleurs pour assurer sa survie ou le fonctionnement de la société. Ce constat semble également impliquer que nous ne considérons pas les artistes comme des travailleurs, nous opposons même assez
systématiquement l’artiste et le travailleur. Le premier, dans l’opinion commune, est souvent
perçu comme oisif, marginal, évoluant dans un monde à part, rêveur et idéaliste. Tandis que le second, confronté aux réalités matérielles, est à la peine et par son activité permet la satisfaction des besoins de chacun.
Et pourtant, au-delà de cette représentation commune, les artistes eux-mêmes font usage du mot "travail" pour évoquer leur activité. L’oeuvre ne naît pas sans effort, sans confrontation à la résistance du matériau qu’ils cherchent à façonner, sans technique, ni sans règle. L’artiste peut-il donc être un travailleur comme les autres ? Si les produits de l’art étaient inutiles, alors pourquoi aucune société humaine n’en est dépourvue ? S’ils étaient sans valeur, alors pourquoi leur consacrons-nous, au sein même de la société, des lieux spécifiques - les musées ? La question posée manifeste donc l’existence d’une tension dans notre rapport à l’art et à l’artiste. D’un côté, les artistes sont perçus comme inutiles, voire perturbateurs pour le fonctionnement de la société, à l’opposé des travailleurs qui s’associent et partagent leurs forces pour permettre à chacun de vivre. Et d’un autre côté, nous accordons aux oeuvres d’art de la considération, de l’importance, voire un statut sacré, puisque nous leur consacrons des musées. Comment ne pas dire alors que l’artiste travaille s’il répond à un besoin ? Et pourtant, comment ne considérer l’activité artistique que comme un travail si nous accordons aux oeuvres d’art une telle valeur ?

Philippe TOUCHET, L’objet technique et le travail, explication d’un texte de Gilbert SIMONDON - PDF : Lien qui présente une rédaction d’explication de texte