La préhistoire en images, l’art pariétal et le thème de la main par Claudine Cohen
Une séance publique de l’Académie des beaux-arts
Le 7 mars 2012 Claudine Cohen était l’invitée de l’Académie des beaux-arts pour une communication passionnante sur « La symbolique des mains dans l’art pariétal paléolithique ». Comme l’ont montré de nombreux anthropologues, la libération de la main par la bipédie est corollaire de la libération de la bouche pour le langage. La main rend l’homme technicien. Comment nos ancêtres de la préhistoire célébraient cet organe que l’historien d’art Henri Focillon dans son Éloge de la main (1934) nommait le "dieu à cinq doigts" ?
Émission proposée par : Marianne Durand-Lacaze
Référence : ES654
Adresse directe du fichier MP3 : http://www.canalacademie.com/emissions/es654.mp3
Date de mise en ligne : 31 mars 2013
THÉÂTRE DÉJAZET / D’IVAN TOURGUENIEV, TRADUCTION MICHEL VINAVER / MES ALAIN FRANÇON
du Vendredi 9 mars 2018 au Samedi 28 avril 2018
Imposante, la mise en scène picturale d’Un mois à la campagned’Ian Tourgueniev. Au centre d’une distribution de haut vol, Anouk Grinberg fait vibrer toute la beauté de son art.
Dans Un mois à la campagne, pièce écrite en 1850 (dont Michel Vinaver signe une nouvelle traduction* pour ce spectacle), Ivan Tourgueniev met en lumière les emportements et les tourments intimes que peut faire naître l’inattendu de l’amour. Il dépeint les souffles d’une passion encombrante qui surgit, un été, dans l’existence cadrée d’une femme appartenant à la haute société russe. Anesthésiée par la monotonie d’un quotidien soumis aux usages des conventions sociales, Natalia Petrovna est ainsi prise d’un brusque regain de vie le jour où elle fait la connaissance de Beliaev, un jeune étudiant qu’elle a engagé comme précepteur, le temps d’un séjour à la campagne, pour s’occuper de son fils Kolia. Au contact de cet employé qui lui ouvre les portes d’un ailleurs, un monde aux multiples possibles se propose soudain à la mère de famille. Un monde au-delà des règles, des conditionnements, qui vient remettre en cause l’immobilisme d’un destin déjà accompli et révéler à elle-même une femme semblant ne s’être jamais réellement posée la question de la liberté, du libre-arbitre, du bonheur. Ce personnage qui envisage pour la première fois le chemin de l’individuation est interprété, dans l’imposante mise en scène présentée par Alain Françon au Théâtre Déjazet (le spectacle a été créé, en janvier dernier, au Théâtre Montansier de Versailles) par Anouk Grinberg.
Un appel de l’ailleurs, qui fait vaciller la raison
Ce qu’accomplit la comédienne dans le rôle de Natalia Petrovna est magistral. Tour à tour joyeuse, grave, piquante, douce, désarçonnée, batailleuse, espiègle…, Anouk Grinberg ne s’appesantit sur rien. Insolite et virevoltante, elle met en évidence les vérités de son personnage, explore toutes les nuances de l’instant pour en éclairer à la fois la fugacité et la profondeur. Se manifestent ainsi les états d’âme d’une femme qui – déstabilisée par la nouveauté de perspectives qui l’exaltent tout en la mettant en danger – tente de retrouver une forme d’équilibre. Et de sérénité. Pour compléter sa distribution, Alain Françon a réuni des interprètes eux aussi remarquables. Nicolas Avinée, Jean-Claude Bolle-Reddat, Laurence Côte, Catherine Ferran, Philippe Fretun, India Hair, Micha Lescot et Guillaume Lévêque donnent corps à la matière rayonnante de ce spectacle vif et délicat, aiguisé et spirituel. Déployant son art de l’essentiel, le grand metteur en scène fait émerger, sous des faux airs de classicisme, la densité de l’humain et la complexité des choses de l’existence. Rien n’est jamais superflu ou forcé dans ce travail d’orfèvre. La justesse, l’ampleur, la nécessité s’imposent ici en tout.
Manuel Piolat Soleymat
* Texte publié chez L’Arche Editeur.
Un mois à la campagne
du Vendredi 9 mars 2018 au Samedi 28 avril 2018
Théâtre Déjazet
41 boulevard du temple, 75003 Paris.
Du lundi au samedi à 20H30. Relâche le dimanche. Tél. : 01 48 87 52 55. www.dejazet.com
THÉÂTRE ELIZABETH CZERCZUK / D’APRÈS STANISLAW IGNACY WITKIEWICZ / MES ELIZABETH CZERCZUK
du Jeudi 8 mars 2018 au Samedi 14 avril 2018
La metteure en scène et comédienne Elizabeth Czerczuk clôt la trilogie Les Inassouvis en s’inspirant librement de Matka (La Mère) de Stanislaw Ignacy Witkiewicz. Un théâtre baroque profondément singulier.
Après Requiem pour les artistes* et son fascinant cortège de morts-vivants, après Dementia Praecox 2.0*, libre adaptation étonnante de la pièce Le Fou et la nonne (1923) de Stanislaw Ignacy Witkiewicz, Elizabeth Czerczuk propose Matka, dernier volet de son triptyque Les Inassouvis, inspiré par la pièce éponyme de son auteur de prédilection. Toujours dans la même veine d’un théâtre total, cathartique, engageant profondément l’âme, et le corps, au point de le parer d’atours spectaculaires. Comme dans certains théâtres traditionnels codifiés, mais avec une liberté singulière dont l’audace fait écho au sens de la dérision et à la tonalité absurde de l’auteur. Méconnu en France, considéré en Pologne comme une figure marquante de l’entre-deux-guerres, Stanislaw Ignacy Witkiewicz, écrivain, peintre et photographe, allie dans ses œuvres le grotesque et le tragique. S’il a élaboré la théorie de la « forme pure » en art, Elizabeth Czerczuk choisit quant à elle de créer un théâtre total, baroque, plastique et chorégraphié, où la vision catastrophiste de l’auteur se teinte d’espoir grâce à l’art, qui permet à l’être humain de combattre sa finitude et de transcender sa condition. Comme si l’artiste ici devenait une sorte de Sisyphe heureux de porter son lourd fardeau, de tracer un sillon créatif irrigué par toutes sortes d’héritages, de désirs et de manques. Matka convoque le couple formé par la mère et le fils (Elizabeth Czerczuk et Zbigniew Yann Rola), qui se déchirent, mais aussi six danseuses, trois musiciens, et un conférencier (Yann Lemo) qui fait entendre les mots de l’auteur.
Un geste d’artiste libre
Plus que le nœud des relations filiales, c’est un tableau exubérant et exacerbé de la décadence qui se déploie, celui d’une « humanité qui dégringole » et s’oublie à travers l’alcool ou les drogues, celui d’une interrogation sur le mystère de l’existence malgré l’écrasement de l’individu. L’énergie puissante de la danse, le pouvoir évocateur de la musique et le jeu expressionniste composent un alliage souvent saisissant, où la parole est reléguée à la marge, d’autant plus qu’elle s’énonce par éclats fragmentés (plus ou moins compréhensibles) sans réels dialogues. Ce qui convainc ici est moins la relation au texte et à l’auteur admiré que le geste théâtral même, plastique et chorégraphié, travaillé avec un engagement unique dans la filiation des maîtres polonais – Tadeusz Kantor, Jerzy Grotowski, Henryk Tomaszewski -, et plus généralement du théâtre slave, lorsque faire du théâtre est la vie même à chaque instant. Dans une tonalité surréaliste parfois beckettienne, le théâtre par sa fabrication follement ambitieuse fait écho à l’imaginaire de l’auteur, qui s’élève contre la contamination du mensonge et la « moutonisation définitive ». Les repères spatio-temporels même en sont chamboulés, et les spectateurs sont littéralement pris par la main pour inverser les places, et quitter leur insolite colline verdoyante pour la scène. Comme un appel à la liberté…
Agnès Santi
*Lire nos critiques dans La Terrasse n°259 et n°261
du Jeudi 8 mars 2018 au Samedi 14 avril 2018
Théâtre Elizabeth Czerczuk
20, rue Marsoulan, 75012 Paris
Les jeudis, vendredis et samedis à 20h30. Tel : 01 84 83 08 80. www.theatreelizabethczerczuk.fr
LE RÉCIT D’UN HOMME INCONNU Anatoli Vassiliev
THÉÂTRE — CRÉATION
27 MARS > 8 AVRIL MC93
- 4H AVEC ENTRACTE
Anatoli Vassiliev réunit un trio artistique talentueux — Valérie Dréville, Sava Lolov, Stanislas Nordey — pour faire entendre une des plus belles et des plus surprenantes nouvelles d’Anton Tchekhov. Véritable plongée dans les méandres des rapports amoureux et dans les tréfonds d’une société russe où les idéaux se délitent.
Comme toujours avec Tchekhov, il y a une histoire racontée le plus simplement possible et il y a ce qui se cache derrière les mots. C’est ce sous-texte qui intéresse particulièrement Anatoli Vassiliev pour ce qu’il révèle de la complexité des êtres et des événements qu’ils traversent. Illusions et désillusions, passions amoureuses et délitements des idéaux dans un pays en proie aux doutes et à la contestation. C’est en fouillant dans les tréfonds obscurs, dans la cave de la maison Russie, que le docteur Tchekhov se révèle un extraordinaire écrivain, un étonnant observateur qui dissèque ce corps en convulsion qu’est devenu sa patrie en cette fin du XIXème siècle. Il y a des accents dostoïevskiens dans cette nouvelle qui résonne étrangement dans la confusion qui semble envahir aujourd’hui notre occident désenchanté.
Avec le Théâtre de la Ville — Paris
Plus qu’une autobiographie lyrique, “Les confessions” racontent la quête d’une âme tournée vers Dieu qui trouve son point d’orgue dans une réflexion sur le temps. Saint Augustin y orchestre une symphonie de thèmes sur la condition humaine, la mémoire et la spiritualité dont les siècles successifs n’ont cessé de s’enchanter. Une splendide méditation sur ce qu’est vivre le temps sans s’y perdre. Un des grands livres de chevet de l’Occident.
vendredi 23 mars à 20h30
Lecture de salut public Xénophon "L’Apologie de Socrate"
avec Jean-Yves Broustail et Nicolas Liautard
Nous retrouvons notre célèbre historien, défenseur d’Athènes et disciple de Socrate dont il fait ici l’apologie. Xénophon nous livre avec cet ouvrage un portrait pittoresque du père de la philosophie occidentale lors de son procès. On y découvre un Socrate parfois joyeux, souvent bourru, mais surtout profondément humain. Et peut-être aussi, plus authentique que l’impeccable maître spirituel que Platon a bien voulu laisser dans nos mémoires.
Jeudi 5 avril à 20h30
L’Iliade Et L’Odysee à Ivry sur Seine
Il faut une belle dose de culot pour s’attaquer à l’épopée, et plus encore, aux mythes fondateurs de L’Iliade et de L’Odyssée. Ce défi, Pauline Bayle a choisi de le relever, parce qu’au moment où l’Europe traverse une crise politique et économique majeure, il est important de faire entendre la voix d’Homère...
L’Iliade et L’Odyssée : la guerre et le retour chez soi. Le premier poème célèbre la force des héros combattants, Achille et Hector, le second la ruse et l’intelligence de celui qui n’arrive pourtant pas à rentrer chez lui. L’audace de la mise en scène n’est pas en reste sur l’audace héroïque : cinq jeunes comédiens portent le monument qu’est L’Iliade. Dans une scénographie minimaliste, laissant se déployer l’imagination du spectateur pour recréer les batailles, le bruit et la fureur. Et ce sont deux comédiennes qui portent les rôles des