La philosophie dans l’académie de CRETEIL
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Hasard et probabilité

* Construire une définition du hasard à partir de ces textes.
Quels problèmes pose la notion de hasard ?

 Texte 1 :
Dieu règne sur tous les peuples. Ne parlons plus de hasard ni de fortune, ou parlons-en seulement comme d’un nom dont nous couvrons notre ignorance. Ce qui est hasard à l’égard de nos conseils incertains est un dessein concerté dans un conseil plus haut, c’est-à-dire dans ce conseil éternel qui renferme toutes les causes et tous les effets dans un même ordre. De cette sorte tout concourt à la même fin ; et c’est faute d’entendre le tout, que nous trouvons du hasard ou de l’irrégularité dans les rencontres particulières.
Bossuet, Discours sur l’histoire universelle (1681).

 Texte 2 :
Toutes choses étant réglées selon des lois certaines, dont le plus souvent l’ordre ne nous est pas connu, celles-là dépendent du hasard dont la cause naturelle nous est cachée.
Pierre-René de Montmort, Essai d’analyse sur les jeux de hasard, 1708/1713, p. XIII.

 Texte 3 :
Ce que nous appelons hasard n’est et ne peut être que la cause ignorée d’un effet connu.
Voltaire, Dictionnaire philosophique, 1764, article Atomes.

 Texte 4 :
Nous attribuons au hasard tous les effets dont nous ne voyons point la liaison avec leurs causes. Ainsi, nous nous servons du mot hasard, pour couvrir notre ignorance d’une cause naturelle qui produit les effets que nous voyons, par des moyens dont nous n’avons point d’idées, ou qui agit d’une manière dans laquelle nous ne voyons point d’ordre ou de système suivi d’actions semblables aux nôtres.
Paul Thiry D’Holbach, Système de la nature (1770).


 Texte 5 :
Le hasard n’a aucune réalité en lui-même : ce n’est qu’un terme propre à désigner notre ignorance sur la manière dont les différentes parties d’un phénomène se coordonnent entre elles et avec le reste de la Nature.
Pierre-Simon Laplace, « Recherches sur l’intégration des équations différentielles aux différences finies, et sur leurs usages dans la théorie des hasards (10-2-1773), in Mémoires de mathématique et de physique présentés à l’Académie Royale des Sciences par divers savants, tome VII, 1776, pp. 37-38).

 Texte 6
Et puis un traité tout à fait nouveau, d’une matière absolument inexplorée jusqu’ici, savoir : la répartition du hasard dans les jeux qui lui sont soumis, ce qu’on appelle en français faire les partis des jeux ; la fortune incertaine y est si bien maîtrisée par l’équité du calcul qu’à chacun des joueurs on assigne toujours exactement ce qui s’accorde avec la justice. Et c’est là certes ce qu’il faut d’autant plus chercher par le raisonnement, qu’il est moins possible d’être renseigné par l’expérience. En effet les résultats du sort ambigu sont justement attribués à la contingence fortuite plutôt qu’à la nécessité naturelle. C’est pourquoi la question a erré incertaine jusqu’à ce jour ; mais maintenant, demeurée rebelle à l’expérience, elle n’a pu échapper à l’empire de la raison. Et, grâce à la géométrie, nous l’avons réduite avec tant de sûreté à un art exact, qu’elle participe de sa certitude et déjà progresse audacieusement. Ainsi, joignant la rigueur des démonstrations de la science à l’incertitude du hasard, et conciliant ces choses en apparence contraires, elle peut, tirant son nom des deux, s’arroger à bon droit ce titre stupéfiant : La Géométrie du Hasard.
PASCAL, Adresse à l’académie parisienne, 1654 ; in Œuvres complètes, Lafuma éd., Seuil, pp. 102-103