La philosophie dans l’académie de CRETEIL
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Nature - culture

Cours sur NATURE ET CULTURE,
proposé par Jean-Louis POIRIER, Doyen honoraire de l’inspection générale de philosophie, à partir des extraits commentés des Essais de MONTAIGNE, Livre I, ch. 31 : Des cannibales, :
Première partie EEE
Deuxième partie EEE

 La morale au-delà de l’opposition naturalisation / artificialisation
Exposé de Vanessa Nurock dans le cadre des Lundis de la Philosophie 2017-2018
 D’où vient la morale ? Une telle question a longtemps semblé peu légitime tant l’ancrage du moral dans le religieux semblait évident. Avec le déclin du religieux, ce problème est devenu une question récurrente sous diverses déclinaisons, dont la plus classique s’est longtemps jouée dans les termes de l’opposition nature/culture. Sommes-nous alors prédisposés à juger moralement ou la morale est-elle une inculcation culturelle ?

L’opposition classique inné/acquis ayant été largement remise en cause dans le courant du 20e siècle, notamment par l’anthropologie, on peut alors suggérer que l’essor des sciences cognitives en général, et en particulier de l’intelligence artificielle, ainsi que le développement de la robotique pourrait conduire à mettre au jour une nouvelle binarité : celle d’une morale entre naturalisation et artificialisation. A la question de savoir si la morale est naturelle ou bien culturelle a ainsi succédé la question de savoir si la morale devait être naturalisée ou bien artificialisée.

Quel sens donner à cette alternative ? Va-t-elle de soi ? Est-elle souhaitable ? J’analyserai la portée et les limites de la naturalisation de la morale et de son artificialisation avant de suggérer une piste permettant de dépasser leur opposition


Pour qui s’intéresse à la société médiévale, la question écologique peut sembler secondaire au regard du rapport à Dieu, des formes de domination ou de l’organisation politique. Les sciences paléo-environnementales, l’archéologie moderne et les textes de l’époque suggèrent pourtant que leurs rapports à la nature sont bien l’une des grandes questions que se posent les hommes du Moyen Âge. Remettant en cause le cliché d’une période de stagnation, livrée aux calamités naturelles, Fabrice Mouthon montre que ces rapports n’ont cessé d’évoluer. L’évêque mérovingien, le serf d’un domaine carolingien, l’hôte d’un village neuf du XIIe siècle, le théologien du XIIIe siècle, ou le maître de forge du XVe siècle ne partagent ni la même vision ni les mêmes attentes vis-à-vis de la nature. Après l’an mille cependant, la croissance démographique, l’amélioration des moyens techniques et la redécouverte de la science grecque ont peu à peu fait basculer l’Occident dans un nouveau paradigme. La maîtrise du monde sensible devient un but collectif légitime et réalisable. La nature est alors fortement mise à contribution.

Ainsi, si l’ouvrage couvre le millénaire médiéval, le coeur de l’enquête reste le grand développement des XIe, XIIe et XIIIe siècles, moment crucial de l’« invention de la nature », gardienne de la Création et de ses lois, et d’une prise de conscience écologique qui n’en a pas encore le nom.

Fabrice Mouthon est maître de conférences en histoire du Moyen Âge à l’université de Savoie. Il travaille en étroite collaboration avec des archéologues et des scientifiques dans une approche transdisciplinaire. Il est l’auteur de plusieurs livres parmi lesquels Les communautés rurales en Europe au Moyen Âge : une autre histoire politique du Moyen Âge (Presses universitaires de Rennes, 2014).