La philosophie dans l’académie de CRETEIL
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LA CREATION

Le rapport de l’épreuve de composition de l’ENS donne quelques pistes :

Certains candidats se sont attachés à le faire à partir de l’immanence ; ils introduisent une tension entre une création transcendante et une création immanente, et se demandent à quelle condition une création peut être immanente. L’art permettait d’amorcer ce développement à partir d’une analyse kantienne du génie, de la volonté de puissance nietzschéenne, ou d’une analyse de l’œuvre en train de se faire, telle qu’elle est donnée à voir dans le film de Clouzot Le Mystère Picasso. Mais on pouvait donner à cette thématique, dont Bergson pouvait être un des inspirateurs, une plus grande amplitude : ce n’est pas seulement la production des objets qui peut être créatrice, mais la vie elle-même, dans sa plus grande banalité. Comme l’écrit Bergson : « Pour un être conscient, exister consiste à changer, changer à se mûrir, se mûrir à se créer indéfiniment soi-même ». La nouveauté s’inscrit dans la répétition, mais la dépasse ; à chaque fois, c’est une autre fois. La rupture qui, dans la création théologique, est le passage extrême de rien à tout, devient la différence interne à la continuité, elle est paradoxalement comprise dans l’indivisible. Une des meilleures copies parle à ce propos de « rupture fragile », qui appartient à l’opération créative, qui n’est jamais certaine de la nouveauté qu’elle apporte, et attend une confirmation rétrospective de l’œuvre qui l’inscrit dans la durée. Le « surgissement continué » de la création provient de la fidélité à un événement qui ne peut être identifié qu’après-coup. Qu’il y ait une association entre la création et la continuité conduit à reconsidérer l’opposition triviale, tirée du principe d’Anaxagore-Lavoisier, entre la création et la conservation. Si « rien ne se perd, rien ne se crée », le tout de ce qui est se conserve dans la transformation des parties, rien de nouveau ne vient s’ajouter à ce qui est déjà donné dans l’état actuel du système. Cependant l’inertie qui semble le principe le plus rationnel pour expliquer cette persévérance de l’être dans l’identité à soi est en elle-même inexplicable : pourquoi l’existence des choses du monde ne cesserait-elle pas ? « De ce qu’un peu auparavant j’ai été, il ne s’ensuit pas que je doive maintenant être » écrit Descartes dans la IIIe Méditation. La même nécessité ontologique et rationnelle qui interroge l’existence des choses – pourquoi les choses sont – met en question leur conservation. Par conséquent on peut penser que la même raison de l’être des choses vaut pour leur apparition, leur production dans l’être, et pour leur conservation. C’est la thèse de la « création continuée », qu’on trouve chez Descartes : la réitération de la création dans la succession du temps est identique à l’acte créateur initial qui introduit une rupture absolue ; car l’initiative créatrice est de tous les instants. Ce n’est pas seulement la conservation qui demande la continuation de la création, mais la venue à l’existence : toute création est continuée. L’opposition entre une création transcendante et une création immanente est donc dépassée quand on fait intervenir la temporalité : qu’on situe l’instance créatrice à l’intérieur du temps, dans la durée elle-même, ou dans un être hors du temps, ce qu’il faut penser, c’est le passage, qui est la vie même dans sa simplicité insondable.
Réfléchir sur la création engageait donc les candidats à revenir sur les données les plus élémentaires de l’expérience. Nul n’ignore ce qu’est la création. Il n’est pas nécessaire d’avoir lu beaucoup de livres, ni d’avoir acquis beaucoup de savoir. Une dissertation n’est pas une restitution de contenus. Elle repose sur une règle simple : se laisser guider par le sujet, et par lui seul. Il y a sans doute dans cette formule la présupposition d’une vertu intrinsèquement organisatrice de ce qu’on appelle le sujet, qui contiendrait un fil directeur qu’il suffirait de trouver, de dérouler, et de suivre. On peut le contester et y voir une naïveté. Mais c’est la règle, et un candidat, par définition, l’a acceptée. Tout ce qu’on lui demande, c’est, comme on le dit familièrement, de jouer le jeu. C’est-à-dire d’abord, de ne pas tricher, de ne pas biaiser avec le sujet, de ne pas chercher à masquer une absence ou un refus de réflexion par un étalage de contenus. Ensuite de faire preuve de la probité qui consiste à s’en tenir au plus près de la vérité du sujet, de le laisser se déployer dans sa structure objective. Puis d’être conséquent avec son propre parcours, en assumant des choix thématiques personnels portés à leur plus grande lucidité. Enfin, autant que possible, de trouver dans ce jeu quelques éclats de la jouissance de la vérité, qui accompagne les meilleures copies.

  • Création et fabrication
  • Reproduction et production créatrice
  • Création et contingence
  • Création et cosmologie
    La création comme acte libre rejoint la définition que Kant donne de la liberté cosmologique comme pouvoir de commencer par soi-même une série causale qui n’est pas déterminée par une cause antécédente.
  • Création ex nihilo
  • Création et changement
  • Création et répétition

Le débat sur la théorie de l’évolution apparaît plus théologico-politique que philosophique dans la mesure où le concept de création n’est pas nécessairement du côté que l’on croit : quoi de plus fixiste que l’idée d’une création unique, définitive et immuable de toutes les espèces vivantes, tandis que l’évolution apparaît…créatrice ?

Construire des problèmes :
à partir de :

1. le concept de "création" est-il théologique ?

  • il n’est pas propre au monothéisme
  • une irruption d’une radicale nouveauté

Si on prête attention, on voit qu’il a un fondement métaphysique

  • Création, continuités et ruptures

Étymol. et Hist. A. 1. Début xiiies. creation del munde (Serm. Sapientia, 286, 6 ds T.-L.) ; spéc. 1688 création continuée (Mallebranche, Entretiens métaphysiques, VII ds Rob.) ; 2. xives. ms. «  action d’établir pour la première fois » (Bersuire, B.N. 20312ter, fo61ads Gdf. Compl. : premiere creation des tribuns) ; 1364 creation d’escevins (Roisin, p. 176) ; 3. a) 1801 en parlant de l’imagination (Crèvecœur. Voyage, t. 2, p. 50 : ... son imagination exerçant toute sa puissance dans la création des présages les plus sinistres) ; 1810 (Staël, Allemagne, t. 2, p. 151 : pour les poètes, il faut que la création précède la parole) ; b) 1843 d’un rôle de théâtre (Balzac, Illus. perdues, p. 527). B. 1. 1790 « ensemble des êtres et choses créées » (Saint-Martin. Homme désir, p. 80) ; 2. 1791 « chose créée » (Volney, Ruines, p. 12 : les créations de la main de l’homme). Empr. au lat. creatio, class. « création, nomination » ; à basse époque « action d’engendrer, procréation » ; en lat. chrét. « création du monde » et « chose créée, créature ».

Le XXe siècle a été, dans tous les domaines de la culture, une ère de ruptures et de
transgressions. Dès avant la Première Guerre mondiale, le rejet de l’ordre « bourgeois » et la
recherche de formes nouvelles s’affirment dans tous les domaines de l’art et de la littérature.
L’expressionnisme, le futurisme, le mouvement Dada et, après la guerre, le surréalisme
multiplient les manifestes à la fois esthétiques et politiques, et se placent à l’« avant-garde »
des évolutions artistiques.
En philosophie, la phénoménologie, l’empirisme logique, les courants marxistes
représentent, chacun à leur manière, une même volonté de rupture avec des formes de
pensée instituées. De la théorie des ensembles à celle de la relativité, de la physique
quantique à l’anthropologie, tous les domaines du savoir connaissent de profonds
bouleversements, d’où résulte en philosophie l’idée d’une crise de la rationalité.
Dans la première moitié du XXe siècle, les avancées techniques de toute nature, les
nouveaux moyens de transport et de communication, le développement de la radio et du
cinéma redessinent la physionomie du monde et transforment l’environnement culturel.
L’idée que l’innovation ira toujours s’accélérant nourrit tout un imaginaire d’anticipation, entre
nouveaux enthousiasmes et nouvelles peurs.
Le modernisme a paru un moment triompher dans tous les domaines, avant que les critiques
à son endroit ne se multiplient. Dans l’ensemble des arts, son héritage est considérable :
éclatement des formes narratives, métissage des traditions, expérimentations généralisées
en poésie, en musique, dans les arts de la scène et dans les arts plastiques, utopies
architecturales, travail sur les limites de la représentation…
Certaines propositions parmi les plus marquantes ont proclamé la « fin » de l’art et de la
littérature. D’autres ont assumé leur lien avec les œuvres du passé qu’elles réinterprètent.
C’est aussi le cas en philosophie. Y a-t-il des ruptures radicales en art, en littérature ou dans
la pensée ? L’ancien – qui remplit les musées, les bibliothèques, les cinémathèques, et dont
on célèbre la valeur patrimoniale – ne subsiste-t-il pas, en accord ou en tension, à côté du
nouveau ou à travers lui ? L’histoire de la culture de l’époque contemporaine invite à réfléchir
sur cette complexité et à se demander si d’autres époques ont connu des querelles et débats
comparables.

Stanley Kubrick, 2001 l’Odyssée de l’espace, 1968
Séquence de la découverte de l’outil, fin de la première partie du film de Kubrick, 2001 l’Odyssée de l’espace, réalisé en 1968. Une analyse de cette séquence est disponible sur le site http://www.analysesdesequences.com

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Récit de la Genèse

Les yeux sans visage
de Franju
Frankenstein

Répétition et création
Révolution

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