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Philosophie Académie de Créteil
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Séminaire Cavaillès
mercredi
27
mai
2020
13h30 - 15h30
horaire ENS – 29 rue d’Ulm – 75005 Paris Salle du Centre Cavaillès (3e étage, droite)

Présentation du séminaire Cavaillès.

Cet événement se déroule du 2 octobre 2019 jusqu’au 27 mai 2020.

Perpétuant les orientations impulsées par Jean-Jacques Kupiec lors de sa création, le séminaire Cavaillès se donne pour objet l’histoire et la philosophie des sciences du vivant. Une fois par mois un acteur des sciences expérimentales ou humaines est invité à y présenter ses travaux et réflexions. Le séminaire se veut ouvert à toutes et à tous, avec l’objectif de croiser les regards, partager les connaissances et favoriser les échanges sur un large spectre de thématiques et de questions. Il entend être le témoin de la vitalité, l’actualité et la fertilité des recherches en épistémologie historique des sciences biomédicales, ainsi que de leur incidence sur les débats scientifiques contemporains.

  • 2 octobre 2019
    Lucie Laplane (CRCN, CNRS UM8590, IHPST, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
    « Les frontières du microenvironnement tumoral »
  • 6 novembre 2019
    Marie-Christine Maurel (Institut de Systématique, évolution, biodiversité UMR7205)
    « Des origines de la vie à la xéno(bio)diversité et à la xénobiologie »
  • 4 décembre 2019
    Daniel J Nicholson (Exeter University)
    « The Processual Organism »
  • 18 décembre 2019
    Jean-Jacques Kupiec
    « Et si le vivant était anarchique » ?
  • 5 février 2020
    Patrick Forterre (Institut Pasteur de Paris et Institut de Biologie Cellulaire Intégrative, Université Paris-Saclay)
    « Les virus dans le monde vivant »
  • 4 mars 2020
    Cécilia Bognon (UCLouvain, Institut Supérieur de Philosophie, CEFISES)
    « La biologie avant la biologie »
    Résumé
    Nous avons récemment publié un volume intitulé Philosophy of Biology before Biology(Bognon-Küss et Wolfe, éd. 2019, Routledge) portant sur l’interaction entre philosophie et sciences naturelles au 18esiècle, période qui anticipe la constitution d’une discipline autonome consacrée à l’étude des phénomènes vitaux. C’est donc à la dynamique de constitution de la biologie comme science, avant 1800, que nous avons consacré ce travail. Nous avons nommé « philosophie de la biologie avant la biologie » l’accent historique et philosophique combiné sur ce processus d’émergence de la biologie.
    Alors que le vivant s’affranchissait de la double juridiction de l’âme immatérielle et de l’artisan créateur, philosophie et sciences de la vie entreprirent en effet, tout au long du 18esiècle, d’en saisir la spécificité par opposition au non-vivant (la machine d’un côté, l’inerte de l’autre), que ce soit par tracé de frontières plus ou moins étanches (organique – inorganique, vie – mort) comme chez Buffon, ou dans des tentatives de caractérisation positive (téléologie, auto-organisation) comme chez Kant. L’on pourrait ainsi, malgré le flottement sémantique qui paraît affecter le terme de « vie » au 18esiècle, concevoir que ce travail souterrain qui consistait à embrasser la vie dans la pluralité de ses manifestations (plantes et animaux), la généralité de ses mécanismes (génération, développement, nutrition, etc.), et la complexité de sa relation à la matière a préparé l’apparition subite de la « biologie » autour de 1800[1]et permis la diffusion rapide de l’idée d’une science empirique des propriétés générales des êtres vivants. On sait que Michel Foucault, dans les Mots et les choses, a proposé de cette émergence un tableau diamétralement opposé. Étayant son argument sur l’absurdité que représentait pour lui l’écriture d’une histoire de la biologie au 18esiècle sur le fait que la biologie ne pouvait alors exister puisque « la vie elle-même n’exist[ait] pas »[2], Foucault entendait montrer que s’il n’y a pas de sens à parler de « biologie » au 18esiècle, c’est parce que « la coupure entre le vivant et le non-vivant, n’est jamais un problème décisif »[3]. Point de « vie » au 18esiècle, mais « seulement des êtres vivants, qui apparaissaient à travers une grille du savoir constituée par l’histoire naturelle »[4].
    Or nous soutenons une thèse doublement inverse, à savoir que 1) la « vie » émerge bel et bien comme problème ontologique au cours du 18esiècle à la faveur d’une réévaluation des rapports qu’entretiennent vie et matière autour du concept pivot d’organisation – réévaluation qui substitue à la division des corps entre les trois règnes une séparation entre l’organique et l’inorganique ; mais que symétriquement 2) il ne suffit pas que la vie se constitue en problème ontologique pour qu’une science empirique et unificatrice de la vie, une biologie scientifique, naisse et se développe. Dans le sillage de l’archéologie foucaldienne, mais à rebours de ses conclusions, nous examinerons donc les conditions de possibilité d’émergence d’une biologie, entendue sous son aspect de « théorie matérielle de la vie »[5]. Nous chercherons à montrer qu’il y a un sens à s’essayer à écrire une philosophie de la biologie avant la biologie, c’est-à-dire avant et l’apparition systématique du mot « biologie » et l’institution de la biologie comme discipline, et à déterminer les conditions de possibilité d’une telle histoire[6].

    [1]En réalité, Mc Laughlin (2002) a parfaitement montré que cette émergence n’a pas été aussi subite qu’on le pensait, puisqu’il identifie chez Hanov (1766) l’utilisation du terme latin « Biologia » dans le titre de son livre, et souligne que le mot y désigne alors l’étude des « lois générales relatives aux choses vivantes ». Cela plaide en tout état de cause pour la reconnaissance de l’existence de l’effort spéculatif intense qui a conduit à la « biologie », c’est-à-dire pour la reconnaissance d’un souci biologique avant la biologie. Nous développons ce point plus en détail au chapitre 4, et dans Bognon-Küss et Wolfe (à paraître).
    [2]Foucault (1966), p. 139.
    [3]Op. cit., p. 174.
    [4]Op. cit., p. 139.
    [5]Nous empruntons cette expression à Gayon (2008).
    [6]Sur ce point voir Bognon et Wolfe (éds.) (2019).

• 1er avril 2020
Romain Gallet
« Étude de l’écologie et du fonctionnement d’un virus multipartite, le Faba Bean Necrotic Stunt Virus »
Résumé
Les génomes viraux peuvent être structurés de trois manières différentes ; ils peuvent être monopartites (un segment génomique dans une capside), segmentés (plusieurs segments génomiques dans une seule capside) ou multipartites. Les virus multipartites ont la particularité d’avoir un génome composés de plusieurs segments tous encapsidés indépendamment. Les virus multipartites sont en majorité des virus de plantes et sont transmis par puceron.
Cette structure génomique est apparue plusieurs fois indépendamment au cours de l’évolution, montrant qu’elle confère un ou plusieurs avantages sélectifs déterminants. Malgré ce constat, nous avons du mal à identifier ce(s) avantage(s) sélectif(s), et à comprendre comment il(s) pourrai(en)t compenser le coût sélectif considérable que représente la perte de segment génomique lors de la transmission (la perte de segment résultant en un échec de l’infection).
Durant ce séminaire, je présenterai 3 ans de recherche effectuée sur le Faba bean necrotic stunt virus, un nanovirus composé de 8 segments génomiques. Je focaliserai ma présentation sur des résultats récents, et qui selon nous, révolutionnent notre conception du fonctionnement viral.

• 6 mai 2020
Barbara Stiegler (Université Bordeaux Montaigne)
« S’adapter : un dévoiement de la pensée darwinienne dans le néolibéralisme ? »
Résumé
Contrairement à ce que soutenait Michel Foucault dans ses cours au Collège de France, le néolibéralisme n’est pas un anti-naturalisme. Il s’est au contraire nourri de sources biologiques, venues à la fois du darwinisme et de sa réinterprétation par les grandes philosophies évolutionnistes de la première moitié du 20e siècle (Spencer, Bersgon et le pragmatisme américain). Mais en se nourrissant de catégories darwiniennes (adaptation, évolution, sélection, mutation, compétition), le néolibéralisme a en réalité trahi les leçons essentielles de l’Origine des espèces. C’est en tout cas l’un des axes de la critique pragmatiste du nouveau libéralisme menée pendant deux décennies par Dewey et contre Lippmann, qui tire de tout autres conséquences sociales et politiques du « laboratoire expérimental de la vie ».

• 13 mai 2020
Ana Soto (Tufts University School of Medicine, Dept Immunology ; Centre Cavaillès, Ecole Normale Supérieure de Paris)
« Carcinogenesis explained within the context of a theory of organisms »
Abstract
Lacking an operational theory to explain the organization and behavior of matter in unicellular and multicellular organisms hinders progress in biology. Such a theory should address life cycles from ontogenesis to death. This theory would complement the theory of evolution that addresses phylogenesis and would posit theoretical extensions to accepted physical principles and default states in order to grasp the living state of matter and define proper biological observables (1).
The fundamental biological principles we proposed for the construction of a theory of organisms are : a) the default state (proliferation with variation and motility (2), b) the principle of organization which addresses the generation and maintenance of stability by closure of constraints, (3) and c) the principle of variation, which is generated both at the cellular and supracellular levels (4). Our experimental research and mathematical modeling efforts are guided by these principles.
For a century, the somatic mutation theory (SMT) has been the prevalent theory to explain carcinogenesis. According to the SMT, cancer is a cellular problem, and thus, the level of organization where it should be studied is the cellular level. Additionally, the SMT proposes that cancer is a problem of the control of cell proliferation and assumes that proliferative quiescence is the default state of cells in metazoa. In 1999, a competing theory, the tissue organization field theory (TOFT), was proposed. In contraposition to the SMT, the TOFT posits that cancer is a tissue-based disease whereby carcinogens (directly) and mutations in the germ-line (indirectly) alter the normal interactions between the diverse components of an organ, such as the stroma and its adjacent epithelium (5). The TOFT explicitly acknowledges that the default (unconstrained) state of all cells is proliferation with variation and motility. When taking into consideration the principle of organization, we posit that carcinogenesis can be explained as a relational problem whereby release of the constraints created by cell interactions and the physical forces generated by cellular agency lead cells within a tissue to regain their default state of proliferation with variation and motility. Within this perspective, what matters both in morphogenesis and carcinogenesis is not only molecules, but also biophysical forces generated by cells and tissues. Herein, we describe how the principles for a theory of organisms apply to the TOFT and thus to the study of carcinogenesis (6).
Literature cited
1. Soto AM, Longo G, Miquel PA, Montévil M, Mossio M, Perret N, Pocheville A, Sonnenschein C. Toward a theory of organisms : Three founding principles in search of a useful integration. Prog Biophys Mol Biol. 2016 122:77-82.
2. Soto AM, Longo G, Montévil M, Sonnenschein C. The biological default state of cell proliferation with variation and motility, a fundamental principle for a theory of organisms. Prog Biophys Mol Biol. 2016b Oct ;122(1):16-23.
3. Mossio M, Montévil M, Longo G. Theoretical principles for biology : Organization. Prog Biophys Mol Biol. 2016 ;122:24-35.

• 27 mai 2020
Pierre-Olivier-Méthot (Université Laval)
« « La plus remarquable histoire de la biologie qui ait jamais été écrite » : Histoire et réception de La logique du vivant de François Jacob »
Résumé
Encensé dans Le Monde par Michel Foucault, La logique du vivant, une histoire de l’hérédité occupe dès sa parution dans la « Bibliothèques des sciences humaines » une place à part dans l’espace intellectuel français. Écartant l’idée que le savoir en sciences biologiques se constitue graduellement et sur le mode cumulatif, la démarche de Jacob vise au contraire à montrer comment, dans le « champ du possible », de nouveaux objets deviennent accessibles à l’analyse, et sous quelles conditions. Or, sous ses allures de livre météorite semblant venir de nulle part, La logique du vivant est un ouvrage qui a lui-même une histoire. Dans cet exposé, il s’agira de restituer quelques éléments propres à cette histoire et d’analyser la réception de La logique du vivant dans le contexte historique et philosophique de la France mais aussi de l’étranger.

Nous remercions très vivement les services de communication et audiovisuel de l’ENS pour leur précieux concours.

Philosopher en Amérique
mercredi
27
mai
2020
18h00 - 20h00
horaire Lieu : Centre Malher (9 rue Malher, 75004 Paris), Salle 107 (1er sous-sol)

Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne (UMR8103)
Centre de philosophie contemporaine de la Sorbonne (PhiCo)

Philosopher en Amérique
Nouveaux lieux, nouvelles expériences, nouvelle tradition philosophique ?

Organisateurs : Léa Boman, Baptiste Cornardeau

Présentation

L’acte de recommencer fait partie du geste philosophique lui-même. Qu’il s’agisse de reprendre un questionnement, de reposer en d’autres termes un même problème, ou d’en déplacer les limites pour en éclairer de nouveaux enjeux. Pourtant le recommencement sur le sol américain prend une autre dimension en faisant fond sur une table rase volontaire des philosophies du vieux continent. Comme si la pensée du « nouveau monde » ne se posait plus contre une certaine tradition, mais contre la tradition en tant que telle. Cette revendication participe alors d’une histoire encore à écrire, d’une société à inventer, d’un pays s’étant donné pour tâche d’explorer et de peupler un continent, et pour qui l’Europe et le reste du monde sont loin. Elle participe aussi de la mise en place d’un nouveau système politique démocratique dans lequel l’accès non seulement à la politique mais dans une certaine mesure à la philosophie se désolidarisent d’un ensemble de privilèges, de traditions et du conservatisme qui marquent encore les conditions concrètes de la pensée en Europe à la même époque.

Emerson le premier désavoue la vieille culture européenne et tente de penser le propre d’une philosophie américaine qu’il invoque autant qu’il invente. William James, John Dewey et les autres pragmatistes revendiquent une philosophie originale et propre aux États-Unis, ayant su se détacher de ses tuteurs européens. Mais loin de s’arrêter aux premiers philosophes américains, cette question de la nouveauté ne cesse de ressurgir pour nourrir le questionnement philosophique. La pensée de philosophes immigrant aux États-Unis s’y heurtera sans doute plus frontalement que les autres : Hannah Arendt, Adorno pour ne parler que des plus critiques à l’égard d’une philosophie à laquelle ils vont néanmoins contribuer. Après Tocqueville, Wittgenstein s’interroge sur le problème de cette transmission culturelle et philosophique : « Que pouvons-nous donner aux Américains ? Notre culture à moitié décomposée ? Les Américains n’ont pour l’instant pas de culture. Mais de nous ils n’ont rien à apprendre. » Pourtant, peut-on philosopher sans rien hériter d’une culture philosophique ? Cela a-t-il encore du sens de poser le problème de la tradition pour une philosophie qui se pose avant tout par sa distance avec elle ? Le problème sera repris au sujet de l’éducation par Hannah Arendt, qui pointe le paradoxe, et à ses yeux les dangers, d’une tradition américaine naissante qui serait fondée sur la nouveauté elle-même. Pourtant, une exploration philosophique et américaine du monde se dessine, à partir d’un retour à une forme d’expérience autant qu’à une attention accrue au langage, qui sera déterminante pour la philosophie contemporaine dans son ensemble.

L’ordinaire, objet démocratique par excellence, abordé de différentes manières, reçoit une place philosophique audacieuse qui est la marque de ce refus des traditions. Après la vague du positivisme logique, qui propose une nouvelle langue philosophique, ses critiques, à commencer par W. V. O. Quine, font bientôt ressortir ses insuffisances et ouvrent la voie à une étude des discours ordinaires. Auparavant, les pragmatistes redonnent une place et un sens nouveaux à l’expérience, en en faisant le fondement d’une reconstruction de la philosophie. Plus généralement, de nouveaux lieux de la philosophie apparaissent. « Les arts qui ont aujourd’hui le plus de vitalité pour l’homme du commun, il ne les tient pas pour des arts : films, jazz, bande dessinée » notait déjà John Dewey. Dans la philosophie de Stanley Cavell, le cinéma en vient justement à occuper une place prépondérante, qui pose explicitement le problème d’une philosophie proprement américaine. Cette innovation en termes d’objets philosophiques s’illustre encore par l’essor de divers champs ou domaines spécifiques, qui peuvent être interprétés comme autant d’approfondissements démocratiques de la philosophie. Ainsi par exemple des études de genre, des études féministes ou écoféministes. Nous proposons dans ce séminaire un balayage de ces évolutions de la philosophie américaine sous l’angle de cette nouveauté radicale et de l’ambition démocratique qui la caractérisent.

Cette nouveauté, comme fait ou revendication intellectuelle et philosophique partagée par les divers courants philosophiques américains, n’empêche qu’ils ne se soient constitués en partie également les uns contre les autres – « sauter d’une poêle à frire dans le feu, puis du feu dans une autre poêle à frire », et ainsi de suite, comme le notait avec humour Hilary Putnam. La nouveauté ne serait-elle alors que sérielle et devrait-elle se nier toujours, laissant problématique la question de l’unité de la philosophie américaine ? En réalité, son hétérogénéité ne doit pas décourager de penser l’expérience d’une pensée philosophique américaine ayant une méthode et une langue philosophiques propres. Il semble en effet difficile de postuler une philosophie américaine en perpétuel recommencement sans perdre une dimension de la philosophie elle-même. L’enjeu de ce séminaire sera d’interroger, à l’aune de différentes philosophies, ce geste du recommencement qui laisse toujours une place précaire, parfois ouvertement problématisée, et souvent encore problématique à la tradition philosophique.

26 février 2020

  • Ivory Day, doctorante rattachée à l’Institut des Sciences Juridiques et Philosophiques de la Sorbonne (ISJPS).
    "W. V. O. Quine : du naturalisme et du pragmatisme à la modalité"

25 mars 2020

  • Magali Cecchet (Paris 1, ISJPS) : De l’« Amérique » à Abya Yala : les problématiques ouvertes par les écoféminismes d’Amérique du Sud et d’Amérique du Nord

22 avril 2020

  • Thomas Mercier-Bellevue (Paris-Sorbonne) : La dernière nouveauté : refondation et historicité dans la philosophie américaine de l’art (Greenberg, Danto, Shusterman)

27 mai 2020

  • Pauline Blisthène (Paris 1, ISJPS) : Le réalisme ordinaire des séries télévisées

Inscription préalable obligatoire à l’adresse : Philo-Recherche@univ-paris1.fr
Site : EXeCO
Facebook : Séminaire doctoral de philosophie américaine

Le sujet de la représentation. Philosophies de l’art moderne et contemporain
mercredi
27
mai
2020
18h30 - 20h30
horaire Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR), 25 rue de la Montagne Sainte Geneviève, 75005 Paris

Marc GOLDSCHMIT
Inscription obligatoire sur ce lien
L’art et l’esthétique ont produit un événement et peut-être un tournant dans la philosophie moderne (de Kant à Nietzsche et au-delà) en participant à la destitution du sujet. La défiguration cubiste, la dérision dadaïste, l’humour noir surréaliste, « l’ironie affirmative » des ready-mades de Duchamp et l’abstraction non figurative ont porté atteinte au sujet de la représentation, et ont déclaré le deuil d’un monde révolu, celui du sujet souverain de la vision et de la theoria.
Obligé de prendre la représentation pour sujet et de devenir autonome (pour s’affranchir notamment de l’esthétisation de la politique), l’art s’est retourné contre soi, dans la négativité critique des avant-gardes ou la dénonciation postmoderne de son aliénation. Cette histoire de l’autonomie moderne a orienté la réflexion contemporaine vers les conditions et les limites de la représentation, vers sa dimension irréductible et hyperbolique. C’est alors qu’a surgi la nécessité de laisser s’inscrire dans la représentation une effraction, un excès, un imprésentable.
La pluralité des arts, des matières-formes, des surfaces, des plans et des gestes nous expose aujourd’hui à de nouvelles responsabilités, à un renouvellement de la réflexion éthique et esthétique, elle nous pousse à nous demander quelles transformations de la sensibilité, de la pensée, de la subjectivité s’attestent dans l’art, quels bouleversements du monde y laissent leurs traces.
Dans cette perspective nous interrogerons la réflexivité de l’art et le dissentiment critique qu’il suscite (au-delà de la dimension cognitive du concept et de celle consensuelle du goût). Nous chercherons le sujet de la représentation à la croisée de la théorie critique et de la critique de la théorie, afin de penser une interface antérieure au partage des arts visuels et
des arts du spectacle, une enfance de la représentation où le théâtre et la peinture, la scène et
l’image, sont immanents l’un à l’autre. Il s’agira de décomposer les pouvoirs de la représentation pour l’ouvrir à un écart où s’exposent la naissance du sujet et la nécessité de l’art.
Programme des séances et intervenants :

  • Vendredi 28 février : Sujet et représentation entre esthétique et politique. La querelle du
    sublime à partir de Lyotard et Rancière
  • Mercredi 18 mars : Le miroir de la représentation, Foucault/Merleau-Ponty
  • Mercredi 1er avril : L’inscription de la déchirure dans la photographie, Barthes et l’énigme du
    punctum
  • Mercredi 22 avril : Marianne Massin, professeur à l’université de Paris Sorbonne :
    Expérience esthétique et art contemporain
  • Mercredi 6 mai : Théâtralité et apostasie de l’art, la déconstruction de l’esthétisation de la politique par Walter Benjamin
  • Mercredi 27 mai : Jacinto Lageira, professeur à l’université de Paris PanthéonSorbonne (Se)Représenter dans une poétique de l’action
  • Mercredi 3 juin : Carole Talon-Hugon, professeur à l’université de Paris-Est Créteil : L’art sous contrôle, nouvel agenda sociétal et censures militantes
  • Mercredi 24 juin : Le figural, la couleur, la surface, le geste, la vibration dans la peinture moderne et contemporaine : vers une matérialité sans matérialisme
Donner à voir l’inexistant : politiques du visible, de Paul Celan aux arts visuels (I)
mercredi
27
mai
2020
18h30 - 20h30
horaire Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR), 25 rue de la Montagne Sainte Geneviève, 75005 Paris

Vicky « SKOUMBI »
Inscription obligatoire sur ce lien
Mer 4 mars, Mer 11 mars, Mer 18 mars, Mer 25 mars, Mer 1 avr, Mer 6 mai, Mer 13 mai,
Mer 27 mai
Séminaire organisé en collaboration avec la revue grecque αληthεια.

À l’intersection du poème et des arts visuels, nous aimerions questionner les modes d’apparition de l’inexistant dans l’art, poésie comprise. Malgré le déluge d’images qui saturent notre vue, des poètes et des artistes tentent de faire voir ce qui hante les marges d’une visibilité supposée sans reste. Diverses stratégies sont mises en place pour donner à voir le plus inapparent.
La première année du séminaire nous essaierons de cerner les figures de l’absence dans l’œuvre de P. Celan. On y trouve un chiasme entre regard et voix qui aurait beaucoup à nous apprendre. Celan s’attache à donner à voir ici et maintenant, ce qui fut à jamais perdu, et dont les traces mêmes furent annihilées. Pour ce faire, le poète invente des procédés qui ouvrent des brèches au sein du visible. Par une singulière empathie, le sujet même de la vision s’en trouve affecté, dans la mesure où les yeux deviennent le support d’inscription du manque à voir, qui troue le visible après l’extermination. L’œil devient ainsi la surface où une trace de la perte est sauvegardée. Parallèlement à cette dé-complétude du visible et à son inscription dans l’œil, s’affirme le pouvoir photophore de la voix : c’est elle qui apporte la lumière qui manque à l’œil défaillant.
Nous aborderons aussi la question du statut de l’image dans l’œuvre de Celan : métaphore « dissonante », allégorie construite à partir d’images contradictoires ou bien image dialectique ? Nous procéderons par la lecture détaillée d’une série de poèmes, tirés des recueils Grille de parole, La rose de Personne et Renverse du souffle.
Le poème Attaque de violoncelle finit par ce tercet : tout est moins qu’il / n’est, / tout est plus.
Nous tenterons de démontrer que ce qui fait le « plus » n’est autre que le « moins » qui le
précède. Ce sont justement les modalités d’inscription dans le visible de ce « moins », site
d’émergence du « plus », qui constituent le véritable objet de notre travail de recherche.
Séance avec intervenant :

  • Mercredi 18 mars : Bertrand Badiou, responsable de l’unité de recherche Paul Celan,
    ENS-Ulm : Paul Celan et l’image