La philosophie dans l’académie de CRETEIL
Slogan du site
Les deux visages du maître : dominus et magister

Despotisme et Démocratie : les ambiguïtés de l’égalité.

Goya dénonce dans son tableau "Tres de mayo", le massacre de la nation espagnole par les troupes françaises, en 1808.

 I. Despotisme et paternalisme

  • a. Chercher le sens des mots "père" et "despote" dans le dictionnaire en ligne CNTRL
  • b. A partir de l’étymologie, quel rapport y-a-t-il entre le père et le despote ?
  • c. Le père est maître (dominus)de maison.
  • Quel mot va donner "dominus" ?
    • Quel lien entretient-il avec la famille ? Qu’interdit-il ?
    • N’y-a-t-il pas d’autres maîtres qui ne sont pas des "domini" ?
      • Qu’en dit Aristote ?

§ 11. Il faut donc, je le répète, reconnaître d’abord dans l’être vivant l’existence d’une autorité pareille tout ensemble et à celle d’un maître et à celle d’un magistrat ; l’âme commande au corps comme un maître à son esclave ; et la raison, à l’instinct, comme un magistrat, comme un roi. Or, évidemment on ne saurait nier qu’il ne soit naturel et bon pour le corps d’obéir à l’âme ; et pour la partie sensible de notre être, d’obéir à la raison et à la partie intelligente. L’égalité ou le renversement du pouvoir entre ces divers éléments leur serait également funeste à tous. Les Politiques, I,2

§ 20. On peut donc évidemment soulever cette discussion avec quelque raison, et soutenir qu’il y a des esclaves et des hommes libres par le fait de la nature ; on peut soutenir que cette distinction subsiste bien réellement toutes les fois qu’il est utile pour l’un de servir en esclave, pour l’autre de régner en maître ; on peut soutenir enfin qu’elle est juste, et que chacun doit, suivant le voeu de la nature, exercer ou subir le pou-voir. Par suite, l’autorité du maître sur l’esclave est également juste et utile ; ce qui n’empêche pas que l’abus de cette autorité ne puisse être funeste à tous deux. L’intérêt de la partie est celui du tout ; l’intérêt du corps est celui de l’âme ; l’esclave est une partie du maître ; c’est comme une partie de son corps, vivante, bien que séparée. Aussi entre le maître et l’esclave, quand c’est la nature qui les a faits tous les deux, il existe un intérêt commun, une bienveillance réciproque ; il en est tout différemment quand c’est la loi et la force seule qui les ont faits l’un et l’autre. § 21. Ceci montre encore bien nettement que le pouvoir du maître et celui du magistrat sont très distincts, et que, malgré ce qu’on en a dit, toutes les autorités ne se confondent pas en une seule : l’une concerne des hommes libres, l’autre des esclaves par nature ; l’une, et c’est l’autorité domestique, appartient à un seul, car toute famille est régie par un seul chef ; l’autre, celle du magistrat, ne concerne que des hommes libres et égaux. § 22. On est maître, non point parce qu’on sait commander, niais parce qu’on a certaine nature ; on est esclave ou homme libre par des distinctions pareilles. Mais il serait possible de former les maîtres à la science qu’ils doivent pratiquer tout aussi bien que les esclaves ; et l’on a déjà professé une science des esclaves à Syracuse, où, pour de l’argent, on instruisait les enfants en esclavage de tous les détails du service domestique. On pourrait fort bien aussi étendre leurs connaissances et leur apprendre certains arts, comme celui de préparer les mets, ou tout autre du même genre, puisque tels services sont plus estimés ou plus nécessaires que tels autres, et que, selon le proverbe : « Il y a esclave et esclave, il y a maître et maître ».

 II. Despotisme et égalité.

  • a. Regarder cet extrait

et celui-ci

  • Pourquoi s’incline-t-on devant le despote ?
  • Comment s’exprime par l’image le renoncement à la liberté ?
    • Le despote est-il seul ?
    • Dialogue-t-il ?
    • Quelle menace met en scène le Parrain
    • Pourquoi se nomme-t-il "parrain" ?
    • Définir la "soumission" (à qui se soumet-on ?
    • Distinguer "soumission" et "contrainte" à partir de ce texte :
    • Définir l’humiliation à partir de ces films, puis en chercher le sens dans le dictionnaire. (Voir plus haut : CRNTL)

Qu’est-ce que le despotisme ?

Question 1 - Définir le despotisme.
A - Le pouvoir arbitraire d’un seul
B - L’exercice de ma réflexion
C - un acte de soumission
Question 2 - Quelle(s)confusion(s)développe le despotisme ?
A - La confusion entre égalité et identité
B - Je n’ai rien compris
C - La confusion des pouvoirs.
Question 3 - Pourquoi Roxane dans Les Lettres Persanes de Montesquieu préfère la mort à l’absence de liberté ?
A - La liberté a plus de valeur que l’égalité qui peut conduire dans ses excès au despotisme.
B - Moi je veux de l’argent comme les autres

 III. Egalité et identité

 IV. Le droit au bonheur

La liberté en tant qu’homme, j’en exprime le principe pour la constitution d’une communauté dans la formule : personne ne peut me contraindre à être heureux d’une certaine manière (celle dont il conçoit le bien-être des autres hommes), mais il est permis à chacun de chercher le bonheur dans la voie qui lui semble, à lui, être la bonne, pourvu qu’il ne nuise pas à la liberté qui peut coexister avec la liberté de chacun selon une loi universelle possible (autrement dit, à ce droit d’autrui). Un gouvernement qui serait fondé sur le principe de la bienveillance envers le peuple, tel celui du père envers ses enfants, c’est-à-dire un gouvernement paternel, où par conséquent les sujets, tels des enfants mineurs incapables de décider de ce qui leur est vraiment utile ou nuisible, sont obligés de se comporter de manière uniquement passive, afin d’attendre uniquement du jugement du chef de l’Etat la façon dont ils doivent être heureux, et uniquement de sa bonté qu’il le veuille également, - un tel gouvernement, dis-je, est le plus grand despotisme que l’on puisse concevoir (constitution qui supprime toute liberté des sujets qui, dès lors, ne possèdent plus aucun droit).

Kant
Théorie et pratique

  Se pose la question de savoir qui doit gouverner

page suivante : qui doit gouverner ?

 V. Eduquer contre le despotisme

C’est dans le gouvernement républicain que l’on a besoin de toute la puissance de l’éducation. La crainte des gouvernements despotiques naît d’elle-même parmi les menaces et les châtiments ; l’honneur des monarchies est favorisé par les passions, et les favorise à son tour : mais la vertu politique est un renoncement à soi-même, qui est toujours une chose très pénible. On peut définir cette vertu, l’amour des lois et de la patrie. Cet amour, demandant une préférence continuelle de l’intérêt public au sien propre, donne toutes les vertus particulières : elles ne sont que cette préférence. Cet amour est singulièrement affecté aux démocraties. Dans elles seules, le gouvernement est confié à chaque citoyen. Or, le gouvernement est comme toutes les choses du monde ; pour le conserver, il faut l’aimer. On n’a jamais ouï dire que les rois n’aimassent pas la monarchie, et que les despotes haïssent le despotisme. Tout dépend donc d’établir, dans la république, cet amour ; et c’est à l’inspirer, que l’éducation doit être attentive. Mais, pour que les enfants puissent l’avoir, il y un moyen sûr ; c’est que les pères l’aient eux-mêmes. On est ordinairement le maître de donner à ses enfants ses connaissances ; on l’est encore plus de leur donner ses passions. Si cela n’arrive pas, c’est que ce qui a été fait dans la maison paternelle est détruit par les impressions du dehors. Ce n’est point le peuple naissant qui dégénère ; il ne se perd que lorsque les hommes faits sont déjà corrompus.

Montesquieu

De l’Esprit des lois

L’amour de la démocratie est celui de l’égalité. L’amour de la démocratie est encore l’amour de la frugalité. Chacun devant y avoir le même bonheur et les mêmes avantages, y doit goûter les mêmes plaisirs, et former les mêmes espérances ; chose qu’on ne peut attendre que de la frugalité générale. L’amour de l’égalité, dans une démocratie, borne l’ambition au seul désir, au seul bonheur de rendre à sa patrie de plus grands services que les autres citoyens. Ils ne peuvent pas lui rendre tous des services égaux ; mais ils doivent tous également lui en rendre. En naissant, on contracte envers elle une dette immense dont on ne peut jamais s’acquitter. Ainsi les distinctions y naissent du principe de l’égalité, lors même qu’elle paraît ôtée par des services heureux, ou par des talents supérieurs. L’amour de la frugalité borne le désir d’avoir à l’attention que demande le nécessaire pour sa famille et même le superflu pour sa patrie. Les richesses donnent une puissance dont un citoyen ne peut pas user pour lui ; car il ne serait pas égal. Elles procurent des délices dont il ne doit pas jouir non plus parce qu’elles choqueraient l’égalité tout de même (1).

(1) « tout de même » : pareillement.

Montesquieu

De l’Esprit des Lois

Comme dans les démocraties le peuple paraît à peu près faire ce qu’il veut, on a mis la liberté dans ces sortes de gouvernements, et on a confondu le pouvoir du peuple avec la liberté du peuple. Mais la liberté politique ne consiste point à faire ce que l’on veut. Dans un Etat, c’est-à-dire dans une société où il y a des lois, la liberté ne peut consister qu’à pouvoir faire ce que l’on doit vouloir, et à n’être point contraint de faire ce que l’on ne doit pas vouloir. Il faut se mettre dans l’esprit ce que c’est que l’indépendance et ce que c’est que la liberté. La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent ; et si un citoyen pouvait faire ce qu’elles défendent, il n’aurait plus de liberté, parce que les autres auraient tout de même (1) ce pouvoir.(1) « Tout de même » signifie ici : « de la même façon », « également ».

Montesquieu

L’Esprit des Lois (1748) Livre XI, chapitres 2 et 3

QUESTIONS :1° Dégagez l’idée principale du texte et les articulations de son exposition.

a) Expliquez :

a) « On a confondu le pouvoir du peuple avec la liberté du peuple » ;

b) « La liberté ne peut consister qu’à pouvoir faire ce que l’on doit vouloir, et à n’être point contraint de faire ce que l’on ne doit pas vouloir » ;

c) Pourquoi Montesquieu affirme-t-il que le citoyen n’aurait plus de liberté s’il pouvait faire ce que les lois défendent ?

3° En quoi les lois sont-elles nécessaires à la liberté ?