La philosophie dans l’académie de CRETEIL
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Avicenne

Avicenne/ Ibn Sînâ

Oeuvres

 LA KAÇÎDAH D’AVICENNE SUR L’AME PAR M. LE Bon CARRA DE VAUX.
 Forget J. Un chapitre inédit de la philosophie d’Avicenne. In : Revue néo-scolastique. 1ᵉ année, n°1, 1894. pp. 19-38 ;
doi : https://doi.org/10.3406/phlou.1894.1359
https://www.persee.fr/doc/phlou_0776-5541_1894_num_1_1_1359
 Le texte suivant est tiré de Perspectives : revue trimestrielle d’éducation comparée (Paris, UNESCO : Bureau international d’éducation), vol. XXIII, n° 1-2, 1993, p. 51-68.
©UNESCO : Bureau international d’éducation, 2000
AVICENNE (IBN SINA)
(370 h ?/980 ? – 428 h/1037) Abdel Rahman Abdel Rahman Al-Naqib1

 Dossier BNF
 Les médecins dans les pays d’Islam
 BENNANI, Azelarabe Lahkim. Être et essence chez Avicenne : lecture de Driss Mansouri In : Pratiquer les sciences sociales au Maghreb : Textes pour Driss Mansouri avec un choix de ses articles [en ligne]. Casablanca : Centre Jacques-Berque, 2014 (généré le 13 octobre 2019). Disponible sur Internet : <http://books.openedition.org/cjb/676> . ISBN : 9791092046229. DOI : 10.4000/books.cjb.676.

Questions
[bleu]
AUTOBIOGRAPHIE[/bleu]

Extraits de son autobiographie

« Mon père fut originaire de Balkh, d’où il se transporte à Bukhârâ, aux temps du règne de Nûh ibn Mansûr. Il s’occupa d’administration et devint, sous le règne de celui-ci, administrateur local d’un village nommé Kharmaithan, dans la province de Bukhârâ. C’est un grand village. Près de lui, il y a un village qui s’appelle Afshanah. Ici mon père épousa ma mère, y habita ; et là je suis né. Puis (ma mère) donna le jour à mon frère. Après un certain temps nous nous sommes transportés à Bukhârâ. Là on m’a emmené au maître qui m’enseigna le Coran et au maître de littérature. A l’âge de dix ans, j’avais déjà appris le Coran par cœur et étudié beaucoup de littérature, de sorte que je fus l’objet d’une immense admiration. (…)
Puis vint à Bukhârâ Abû ‘Abd-Allâh al-Nâtilî, qui prétendait à la philosophie. Mon père le fit loger chez nous pour que j’apprenne de lui. Avant sa venue, j’avais suivi les cours de jurisprudence (fiqh) donnés par Ismâ’îl al-Zâhid. Je fus un des meilleurs élèves. Je devins habitué et rompu aux méthodes de question et d’objection à l’adversaire, selon la manière adoptée chez les maîtres de cette science. Puis j’ai commencé à apprendre l’Isagoge (de Porphyre) auprès d’al-Nâtilî. (…)
Par la suite, j’ai commencé à lire pour moi-même, consultant les commentaires, jusqu’à ce que je devinsse maître de la logique. (…) Je me suis appliqué à étudier les livres de physique et de métaphysique, tant les textes que les commentaires. Les portes de la science commencèrent à s’ouvrir à moi. (…) J’ai continué de la sorte jusqu’à ce que je me rendisse maître de toutes les sciences et les connusse selon la capacité humaine. (…) Quand j’ai eu dix-huit ans, j’avais fini avec toutes ces sciences. »

Extrait de l’autobiographie d’Avicenne, traduction de ‘Abdurrahmân Badawi, Histoire de la philosophie en Islam, Paris, Vrin, 1972, Vol. II, p. 595-598.

La méthodologie d’Avicenne

« J’ai relu la logique (al-mantiq) et toutes les parties de la philosophie. Durant ce temps, je ne dormais pas une nuit entière ; durant le jour je ne me préoccupais que de l’étude. Je classais des fiches ; chaque argument que j’étudiais je le consignais dans une fiche en y inscrivant les prémisses syllogistiques, pour voir ce qu’elles pouvaient conclure ; j’ai pris soin de satisfaire aux conditions requises dans les prémisses pour que la vérité éclate dans la question traitée. Toutes les fois qu’un problème m’embarrassa et que je ne pouvais pas trouver le moyen terme d’un syllogisme, je me rendais à la mosquée, priant, et invoquait le Créateur du Tout jusqu’à ce qu’Il me révélât la solution de ce fait obscur et difficile. (…) Dès qu’un peu de sommeil me prend, je rêve de ces mêmes questions, de sorte que plusieurs d’entre elles trouvaient leurs solutions en rêve. »

Extrait de l’autobiographie d’Avicenne, traduction de ‘Abdurrahmân Badawi, Histoire de la philosophie en Islam, Vrin, 1972, t. 2, p. 596.


 L’autobiographie d’Avicenne Extraits

 [bleu]TEXTES sur la métaphysique[/bleu]

Quel est le sujet de la métaphysique ?

« J’ai lu le livre de La Métaphysique (d’Aristote), sans rien y comprendre ; le dessein de son auteur devint pour moi obscur. Je l’ai relu quarante fois, de sorte que je l’ai appris par cœur. Pourtant je ne pouvais pas encore saisir ce qu’il y a là-dedans et le dessin de son auteur. Désespérant de moi-même, je me suis dit : il n’y a pas moyen de comprendre ce livre. Un jour, l’après-midi, je me trouvais au marché des livres. Un crieur tenait dans la main un volume qu’il mettait en vente ; il me l’offrit, mais, dégoûté, je l’ai refusé, croyant qu’il n’y a aucune utilité dans cette science (la métaphysique). Alors il me dit : achète-le, il est bon marché, je te le cède à 3 drachmes, et son propriétaire a besoin d’argent. Je l’ai acheté ; je me suis aperçu que c’est le livre d’Abû Nasr al-Fârâbî* intitulé Du dessin du livre de la Métaphysique [d’Aristote]**. Je suis rentré chez moi et je me pressai de le lire ; et aussitôt son dessin se révéla à moi, parce que je connaissais le livre par cœur. »

Traduction de ‘Abdurrahmân Badawi, Histoire de la philosophie en Islam, Vrin, 1972, t. 2, p. 595 ss.

* Abû Nasr al-Fârâbî (872-950), cf. séance 1, « Le contexte intellectuel : (3) La falsafa
** En arabe : Fî aghrâd kitâb mâ ba‘d al-tabî‘ah

Le sujet de la métaphysique n’est pas Dieu

« On sait que chaque science a un sujet qui lui est propre. Cherchons maintenant le sujet de cette science ; quel est-il ? Si c’est l’être de Dieu - qu’Il soit exalté -, ou si ce n’est pas cela, mais que l’être de Dieu est l’une des choses que l’on recherche dans cette science ?
Nous dirons donc : il n’est pas possible que cela [Dieu] soit le sujet de la philosophie première, parce que le sujet de toute science est quelque chose dont on admet l’existence dans cette science. Ce que l’on cherche, c’est justement ses modes. (…) Or l’existence de Dieu – qu’Il soit exalté - ne peut pas être admise dans cette science comme sujet, mais elle y est recherchée. »

Métaphysique du Livre de la Guérison, Livre 1, chapitre 1, traduction de G. C. Anawati légèrement modifiée, Tome 1, Paris, Vrin, 1978, p. 87.

Examen critique de la deuxième opinion : la métaphysique permet de vérifier les principes des autres sciences

« Et tu entendais dire également qu’il y avait une véritable philosophie (falsafa bil-haqîqa) et une philosophie première, et que c’est elle qui fournit le moyen de vérifier les principes des autres sciences, et que c’est elle qui est la sagesse (al-hikma), la vérité. »

Métaphysique du Livre de la Guérison, Livre 1, chapitre 1, traduction de G. C. Anawati, Tome 1, Paris, Vrin, 1978, p. 86.

L’existant en tant qu’existant comme sujet de la métaphysique

« Il apparaît donc clairement, à partir de cet ensemble, que l’existant en tant qu’existant est quelque chose de commun à tout ceci et qu’il faut poser qu’il est le sujet de cette discipline, comme nous l’avons dit. Il en est ainsi parce qu’il n’exige pas que l’on connaisse sa quiddité et qu’on l’établisse préalablement, de sorte qu’on aurait besoin qu’une science, différente de cette science-ci, prenne en charge de mettre en évidence ce dont il s’agit. En effet il est impossible d’établir le sujet et de vérifier ce qu’est sa quiddité dans la science dont il est le sujet, mais il faut seulement admettre son existence et sa quiddité. Ainsi, le sujet premier de cette science est l’existant en tant qu’existant, et le champ de ses recherches concerne les choses qui accompagnent nécessairement l’existant en tant qu’existant, sans aucune condition.
Une partie de ces choses est pour l’existant comme sont les espèces : telles la substance, la quantité et la qualité. En effet, l’existant n’a pas besoin d’une division antérieure pour se diviser en elles. Tandis que la substance a besoin de divisions avant d’impliquer la division en homme et non-homme. Et d’autres choses sont comme les accidents propres, par exemple l’un et le multiple, la puissance et l’acte, l’universel et le particulier, le possible et le nécessaire. C’est que l’existant n’a pas besoin, pour recevoir ces accidents et pour avoir une disposition à leur égard, d’être déterminé singulièrement en existant physique, mathématique, moral ou autre. »

Métaphysique du Livre de la Guérison, Livre 1, chapitre 2, traduction de Souâd Ayada, Avicenne, Paris, Ellipses, 2002, p. 42.

 Textes sur la destinée de l’âme humaine


Avicenne, La métaphysique du Livre de la Guérison (Al-Shifâ), Livres 6 à 10, traduction de
l’arabe de Georges C. Anawati,
Etudes Musulmanes, Paris, Vrin, 1985.
Livre 9, chapitre 7, p. 157-165, consacré à la destinée de l’âme humaine

 [bleu]La démonstration de l’existence de Dieu[/bleu]

L’existant comme notion première

« L’existant (al-mawjûd) et la chose font partie des significations qui « se dessinent dans l’âme d’un dessein premier ; dessin qui n’a pas besoin d’être acquis à partir d’autres choses plus connues qu’elles. »

Métaphysique du Livre de la Guérison, Livre 1, chapitre 5, tr. de G. C. Anawati, p. 106.

« L’être, la raison le connaît par elle-même sans recourir à définition ni description parce que l’être n’a pas de définition, parce qu’il n’a ni genre ni différence, car rien n’est plus général que l’être ; d’autre part, l’être n’a pas de définition descriptive, car rien n’est plus connu que lui. »

Avicenne, Le Livre de Science, Tome I, « Métaphysique », tr. du persan de Mohammad Achena et Henri Massé, 1955, Les Belles Lettres, p. 94.

La distinction entre l’être possible par soi et l’être nécessaire par soi

« Nous disons que les choses qui sont du domaine de l’existence, l’esprit peut les diviser en deux : (a) celles qui, considérées en elles-mêmes, n’ont pas une existence nécessaire. Or il est évident qu’elles ne sont pas non plus impossibles sinon elles ne seraient pas du domaine de l’existence, et cette chose est dans le domaine du possible. (b) Et il y a des choses qui, considérées en elles-mêmes ont une existence nécessaire. »

Métaphysique du Livre de la Guérison, Livre 1, chapitre 6, tr. de G. C. Anawati, p. 113.

La démonstration avicenienne de l’existence de Dieu

« Directive [Toute existence d’un possible vient d’autrui]
Celui qui a en partage la possibilité ne devient donc pas existant par soi-même. Car, de soi, son existence ne convient pas mieux que son inexistence, en tant qu’il est possible. Si l’une vient à convenir davantage, c’est à cause de la présence ou de l’absence d’autre chose. Ainsi l’existence de tout possible vient d’autrui.
 
Remarque [Un enchaînement de possibles à l’infini n’introduit pas de nécessité].
Si cela s’enchaîne à l’infini, chacune des unités de la chaîne est en elle-même possible et le total dépend d’elles toutes, il n’est donc pas nécessaire non plus, mais il le devient par autre chose. Nous allons expliquer cela davantage.
 
Commentaire.
Tout total dont chaque unité est causée exige une cause extrinsèque à chacune d’elles. Cela parce que, ou bien il n’exige une cause en aucune manière et il est alors nécessaire, non pas causé, – et comment cela arriverait-il alors qu’il est seulement nécessité par ses unités ? – Ou bien il exige une cause qui est toutes ses unités sans exception ; il sera alors causé par lui-même et, par conséquent, cette cause, la somme et le tout, ne font qu’un. Quant au « tout », pris avec le sens de « chaque individu », le total n’est pas nécessité par lui. Ou bien il existe une cause qui soit certaines des unités ; mais il n’y en a pas qui en soient plus dignes les unes que les autres parce que, chacune étant causée, c’est sa cause qui est plus digne. Ou bien il existe une cause en dehors de toutes les unités, et c’est l’Éternel. (…)
Toute chaîne disposée à partir de causes et d’effets, est finie ou infinie. Il s’est montré évident que, si elle inclut seulement ce qui est causé, elle a besoin d’une cause extrinsèque, mais avec laquelle elle soit en jonction, sans aucun doute, par une de ses extrémités. Il est clair que, s’il y a en elle quelque chose qui n’est pas causé, ce sera une extrémité, une limite. Toute chaîne, donc, se termine à l’Être nécessaire par soi. »

Livre des Directives et des Remarques, « De l’être et de ses causes », traduction française d’Amélie-Marie Goichon, Paris, Unesco / Vrin, 1999, p. 358-360.

- La place du Coran dans les œuvres philosophiques d’Avicenne : des références ponctuelles qui viennent après une argumentation, à titre illustratif

« Médite comment pour établir l’existence du Premier [= Dieu], son unicité, son affranchissement de la matière, notre explication n’a pas eu besoin de porter la réflexion sur autre chose que l’être même, et n’a pas eu besoin de considérer qui l’a créé, ni qui l’a fait, bien que ceci donne une preuve du Premier. Mais cette manière est plus solide et plus noble ; c’est-à-dire que, lorsque nous considérons l’état de l’être, l’être témoigne de lui en tant qu’il est l’être, et lui-même, après cela, atteste le reste de ce qui vient après lui dans l’existence.
Je signale quelque chose de semblable dans le Livre divin : « Nous leur montrerons nos signes dans les diverses régions et en eux-mêmes. »* Ceci, dis-je, est la règle pour les gens du commun. Puis le livre continue : « Ne suffit-il pas que ton Seigneur rende témoignage de toutes choses ? ».* Je dis que ceci est la règle pour les justes (hokm lil-siddîqîn) qui en appellent à un témoignage porté par lui et non pas sur lui. »

* Parties du verset 53 de la sourate “Les versets détaillés” (fussilat)

Livre des Directives et des Remarques, « De l’être et de ses causes », traduction française d’Amélie-Marie Goichon, Paris, Unesco / Vrin, 1999, p. 371-372.

[bleu]L’existence et l’essence[/bleu]

La distinction de l’existence et de l’essence

« Sache que tu comprends l’idée de triangle tout en te demandant s’il a l’être pour attribut dans les essences concrètes ou non. Ceci après qu’il s’est représenté à toi comme formé d’une ligne et d’une surface, mais sans te représenter qu’il est existant parmi les individus. »

Livre des Directives et des Remarques, « De l’être et de ses causes », traduction d’Amélie-Marie Goichon, Paris, Unesco / Vrin, 1999, pp. 354-356.

« Il est évident que toute chose a une réalité essentielle particulière qui est sa quiddité. On sait, en outre, que la réalité essentielle de toute chose, qui lui est propre, est autre que l’existence, qui est synonyme de l’établissement dans l’être. Il en est ainsi parce que si tu dis : une réalité essentielle quelconque est existante, soit concrètement, soit dans les âmes, soit absolument parlant (comme une nature commune à la réalité essentielle concrète et à la réalité essentielle dans les âmes), eh bien cela aura une signification déterminée que l’on comprendra. Mais si tu dis : une réalité essentielle quelconque, c’est une réalité essentielle quelconque, ou encore : une réalité essentielle quelconque, c’est une réalité essentielle, ce sera là pur verbiage et parole sans intérêt. De même, si tu dis : une réalité essentielle quelconque, c’est une chose, tu tiendras là encore un propos qui ne nous enseignera rien de ce que nous ignorons. (…)
En fait, la signification de l’existence possède une certaine concomitance avec la « chose » et ne s’en sépare jamais. Bien plus, la signification de l’existant est un concomitant permanent de la « chose » parce que la chose existe soit concrètement, soit dans l’estimative ou dans l’intellect. S’il n’en était pas ainsi, ce ne serait pas une « chose ». »

Métaphysique du Livre de la Guérison, Livre 1, chapitre 5, traduction de Souad Ayada, Avicenne, Paris, Ellipses, 2002, p. 35.

« Le Premier n’a pas d’autre essence/quiddité que l’existence. »

Métaphysique du Livre de la Guérison, Livre 8, chapitre 4.

« Nous disons que les choses qui sont du domaine de l’existence, l’esprit peut les diviser en deux : (a) celles qui, considérées en elles-mêmes, n’ont pas une existence nécessaire. Or il est évident qu’elles ne sont pas non plus impossibles sinon elles ne seraient pas du domaine de l’existence, et cette chose est dans le domaine du possible. (b) Et il y a des choses qui, considérées en elles-mêmes ont une existence nécessaire. »

Métaphysique du Livre de la Guérison, Livre 1, chapitre 6, traduction de G. C. Anawati, Tome 1, Paris, Vrin, 1978, p. 113.

« Le Premier n’a pas d’autre quiddité que l’existence. Tu sais ce qu’est la signification de la quiddité et par quoi elle se distingue de l’existence en ce qui fait leur différence mutuelle, grâce à ce que nous avons expliqué au début de notre exposé. Nous dirons donc : l’existant nécessaire n’a pas de quiddité qui impliquerait la nécessité de son existence. Non ! Mais disons derechef que l’existant nécessaire intellige l’existant nécessaire lui-même, comme l’un intellige l’un lui-même et intellige par là que sa quiddité est, par exemple, « homme » ou une autre substance. Et c’est cet homme qui serait alors l’existant nécessaire ! Tout comme on intelligerait, de l’un qu’il est « eau », ou « air », ou « homme », alors qu’il est un […].
Nous disons : il est impossible que l’existant nécessaire soit tel qu’il comporte une composition de sorte qu’il y ait là une certaine quiddité, et que ce soit cette quiddité qui soit ensuite dotée de l’existence nécessaire. En effet, cette quiddité aurait alors une signification différente de sa propre réalité effective. Cette signification serait la « nécessité de l’existence ». Prenons un exemple : si cette quiddité, par hypothèse, était qu’il est « homme », alors le fait, pour lui, d’être « homme » diffèrerait du fait d’être nécessairement existant. Mais en ce cas, nous ne sortirons pas de l’alternative suivante : ou bien notre expression « nécessité de l’existence » possède ici une réalité effective, ou bien elle n’en a pas. Or il est impossible que cette signification n’ait pas de réalité effective, alors qu’elle désigne le principe même de toute réalité effective ! Mieux encore, elle confirme dans l’être toute réalité effective et lui octroie sa vérité.
Si l’existant nécessaire avait une réalité effective qui fût autre que cette prétendue quiddité, et si cette nécessité de l’existence impliquait qu’il fût attaché à cette quiddité, et qu’il ne fût pas nécessaire sans elle, alors ce que désigne la signification d’existant nécessaire, en tant précisément qu’il est existant nécessaire, existerait par une chose qui ne serait pas lui. »

Métaphysique du Livre de la Guérison, Livre 8, chapitre 4, traduction de Souâd Ayada, Avicenne, Paris, Ellipses, 2002, p. 50.

« Tout ce qui a une essence est causé. Et toutes les choses autres que le nécessairement existant ont des essences, et ces essences sont celles qui en elles-mêmes sont possiblement existantes. L’existence ne leur survient (ya‘rid) que de l’extérieur. »

Métaphysique du Livre de la Guérison, Livre 8, chapitre 4, traduction de G. C. Anawati légèrement modifiée, Tome 2, Paris, Vrin, 1985, p. 88.

  • [bleu]L’origine et la structure du monde[/bleu]

    • La pensée d’Avicenne et ses horizons de possibles :Récits et figure(s) du sage Séance 12 -