La philosophie dans l’académie de CRETEIL
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Qu’est-ce que la justice ? Aristote
On pourrait se poser la question de savoir si nos déterminations de l’injustice subie et de l’injustice commise sont suffisantes, et, en premier lieu, si les choses se comportent comme le dit Euripide dans cette étrange parole :
-- J’ai tué ma mère : tel est mon bref propos.
-- Est-ce de votre consentement et du sien ? Ou bien n’y avez- vous consenti ni l’un ni l’autre ?
Est-ce qu’il est, en effet, véritablement possible de subir volontairement l’injustice, ou au contraire n’est-ce pas là quelque chose de toujours involontaire, de même que commettre l’injustice est toujours volontaire ? En outre, est-ce que subir l’injustice est toujours volontaire ou toujours involontaire, ou bien dans certains cas volontaire et dans certains autres, involontaire ? Même question en ce qui concerne le fait d’être traité avec justice : agir justement est toujours volontaire, de sorte qu’il est raisonnable de supposer semblable opposition dans les deux cas, entre être traité injustement et être traité justement, d’une part, et être volontaire ou involontaire, d’autre part. Pourtant il pourrait sembler étrange de soutenir que même le fait d’être traité justement est toujours volontaire, car on est parfois traité justement contre sa volonté.
Ensuite, on pourrait aussi se poser la question suivante : l’homme qui a subi ce qui est injuste est-il toujours traité injustement, ou bien en est-il du fait de supporter l’injustice comme il en est du fait de la commettre ? En effet, comme agent aussi bien que comme patient, on peut participer par accident à une action juste, et il en est évidemment de même pour les actions injustes : accomplir ce qui est injuste n’est pas la même chose qu’agir injustement, et subir ce qui est injuste n’est pas non plus la même chose qu’être traité injustement, et il en est de même du fait d’agir justement et d’être traité justement, car il est impossible d’être traité injustement si un autre n’agit pas injustement, ou d’être traité justement si un autre n’agit pas justement.
Mais si agir injustement consiste purement et simplement à causer du tort volontairement à quelqu’un, et si volontairement a le sens de avoir pleine connaissance et de la personne lésée, et de l’instrument, et de la manière, et si l’homme intempérant se fait volontairement du tort à lui-même, il s’ensuivra à la fois que volontairement il sera injustement traité et qu’il lui sera possible d’agir envers lui-même injustement (c’est là d’ailleurs aussi une des questions que nous avons à nous poser : peut-on agir injustement envers soi-même ?). De plus, on pourrait volontairement, par son intempérance, subir un dommage de la part d’une autre personne agissant volontairement, de sorte qu’on pourrait être volontairement traité injustement. Mais notre définition n’est-elle pas incorrecte, et ne doit-on pas ajouter à causer du tort en ayant pleine connaissance et de la personne lésée, et de l’instrument, et de la manière, la précision suivante : contrairement au souhait réfléchi de ladite personne ? Ceci une fois admis, un homme peut assurément subir volontairement un dommage et supporter ce qui est injuste, mais il ne peut jamais consentir à être traité injustement, car personne ne souhaite cela, pas même l’homme intempérant, mais il agit contrairement à son propre souhait, puisque personne ne veut ce qu’il ne croit pas bon pour lui, et l’homme intempérant fait des choses qu’il pense lui-même n’être pas celles qu’il doit faire. D’ailleurs, celui qui donne ce qui lui appartient en propre, comme, selon Homère, Glaucus donnait à Diomède :
« Des armes d’or pour des armes de bronze,
la valeur de cent boeufs pour neuf boeufs 1 »,
celui-là n’est pas injustement traité : car, bien que donner dépende de lui, être
injustement traité n’est pas en son pouvoir, mais il faut qu’il y ait une autre personne qui
le traite injustement »
Aristote, Éthique à Nicomaque, V, 11, édition Tricot (1136a - 1136b)

I. Dans ce texte, Aristote soulève un certain nombre de difficultés relatives à la définition de la justice et l’injustice.
Ces difficultés posent le nécessaire examen des cas. La justice ne relève pas que de l’application du droit.

  • relever dans le ,texte les différentes difficultés et les traduire par des exemples.
  • Quels sont les différents visages de l’injustice ?

II. La justice pour Aristote n’est pas indépendante de l’acte de juger. Il n’y a aucune justice divine ou transcendante (c’est la quatrième partie du Léviathan)
Juger c’est rendre compte de la nature des choses
On peut subir la justice comme imposée (lors d’un procès qui figure la loi dans son extériorité.). Dès lors on peut ne pas vouloir la justice ?
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Extrait de film : le Procès d’Orson Welles[/bleu]

  • La voix semble venir de partout et de nulle part. Comment le réalisateur met-il en scène le thème du "jugement dernier" ?
  • Que signifie la position du juge ?
  • Comment se donne à saisir la pratique du jugement ?

III. une injustice est-elle nécessairement injuste ? On peut mériter ce qui nous arrive (ex : l’escroc escroqué)

IV. Le consentement ne dépend pas de la volonté mais de "la disposition" de son être.
On peut participer à une injustice en y contribuant sans savoir : Aristote montre qur l’action dépend de coïncidences.