La philosophie dans l’académie de CRETEIL
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La disparition de l’humain

QUESTIONS
 Qu’est-ce qui explique selon Adorno la perte de la perception de l’humain dans les crimes contre l’humanité ?
 Comment le meurtre est-il possible ?
 Expliquer les exemples ;

Les humains te regardent - L’indignation que suscitent les cruautés commises diminue à mesure que les victimes cessent de ressembler aux lecteurs normaux, qu’elles sont plus brunes, « plus sales », plus proches des « Dagos » . Voilà qui éclaire autant sur les atrocités que sur les spectateurs. Peut être la schématisation sociale de la perception est elle ainsi faite chez les antisémites qu’ils ne voient plus du tout les Juifs comme des hommes. L’assertion courante selon laquelle les Sauvages, les Noirs, les Japonais ressemblent à des animaux, par exemple à des singes, est la clé même des pogromes. Leur éventualité est chose décidée au moment où le regard d’un animal blessé à mort rencontre un homme. L’obstination avec laquelle celui ci repousse ce regard - « ce n’est qu’un animal » - réapparaît irrésistiblement dans les cruautés commises sur des hommes dont les auteurs doivent constamment se confirmer que « ce n’est qu’un animal », car même devant un animal ils ne pouvaient le croire entièrement. Dans la société répressive la notion d’homme est elle même une parodie de la ressemblance de celui ci avec Dieu. Le propre du mécanisme de la « projection pathique » est de déterminer les hommes détenant la puissance à ne percevoir l’humain que dans le reflet de leur propre image, au lieu de refléter eux-mêmes l’humain comme une différence. C’est alors que le meurtre apparaît comme une tentative constamment répétée, dans une folie croissante pour déguiser en raison la folie d’une perception aussi erronée : celui qu’on n’a pas perçu comme un être humain et qui pourtant est un homme, est transformé en chose afin qu’aucun de ses mouvements ne mette en cause le regard du maniaque.

Adorno Texte extrait de :Minima moralia Réflexions sur la vie mutilée, §68, Payot, 2003

Alain Resnais, Nuit et Brouillard, 1955.

= 1er documentaire français sur les camps .

Est composé :
 d’images en noir et blanc qui sont des archives de guerre : soit des archives nazies (beaucoup de photos fixes), soit des archives des armées alliées qui ont ouvert les camps en 1945.
 d’images en couleurs tournées en 1955 à Auschwitz.
Le commentaire a été écrit par le romancier et ancien déporté Jean Cayrol, et est dit par l’acteur Michel Bouquet.

Ce documentaire a beaucoup marqué après une période de 10 ans de mutisme sur le sujet. Ce mutisme peut s ‘expliquer par :
 la volonté d’oublier la souffrance, de reconstruire sur de nouvelles bases
 la peur des rescapés des camps de ne pas être crus sur l’ampleur des persécutions subies.
Puis ce documentaire a été utilisé dans les lycées , surtout dans les années 1970, pour permettre une prise de conscience par les jeunes, ainsi que pour lutter contre le révisionnisme (le fait d’essayer d’amoindrir l’ampleur du génocide) et le négationnisme (ex : en 1978, Louis Darquier de Pellepoix, ancien commissaire aux questions juives sous Vichy, nie l’existence des chambres à gaz).
=> il s’agit de montrer la réalité des camps.

Alain Resnais insiste sur plusieurs aspects du génocide :
 la déshumanisation subie par les déportés
 l’utilisation de méthodes industrielles pour tuer : appel à la technique, à la science pour tuer massivement : « la logique » mise au service de la folie meurtrière... Environ 2,7 millions de victimes dans les camps d’extermination entre la fin de l’année 1941 et 1944 / plus d’1 million de victimes à Auschwitz / presque 6 millions de juifs morts pendant la guerre.
=> un film fort.
 ;
Mais dans les années 1950, on manque encore de recul et surtout d’analyses historiques rigoureuses. Dans ce documentaire, la spécificité du génocide juif n’est pas bien prise en compte :
 différents types de déportés mis sur le même plan.
 Différents types de camps juxtaposés sans explication claire : camps de transit, camps de concentration, camps d’extermination.
Par ailleurs, ce film a été soumis à la commission de censure française, qui a imposé à Resnais de retirer l’image d’un policier français devant le camp de Pithiviers. Cette censure montre que l’on accepte de montrer la réalité des camps, mais pas encore la collaboration de la France de Vichy dans la déportation.
Enfin, ce film a été retiré de la compétition officielle de Cannes sous pression de l’ambassade allemande de France, car l’Allemagne ne veut pas remettre en question le début de rapprochement franco-allemand dans les années 50 (CECA…). Elle a peur que ces images accablantes nuisent à la réconciliation.
Source : http://www.memorialdelashoah.org/upload/minisites/voyages/f-m-s/medias/06_cr03_Chateaudun/include/F_Nuit_Brouillard.htm