La philosophie dans l’académie de CRETEIL
Slogan du site
Sujets Baccalauréat

SUJETS BACCALAUREAT

996TECHN.ANTILLESNORMALELa conscience est-elle source de liberté ou de contrainte ?
1996ESANTILLESREMPLACEMENTLa religion, qui est fondée simplement sur la théologie, ne saurait contenir quelque chose de moral. On n’y aura d’autres sentiments que celui de la crainte, d’une part, et l’espoir de la récompense de l’autre, ce qui ne produira qu’un culte superstitieux. Il faut donc que la moralité précède et que la théologie la suive, et c’est là ce qui s’appelle la religion.La loi considérée en nous s’appelle la conscience. La conscience est proprement l’application de nos actions à cette loi. Les reproches de la conscience resteront sans effet, si on ne les considère pas comme les représentants de Dieu, dont le siège sublime est bien élevé au-dessus de nous, mais qui a aussi établi en nous un tribunal. Mais d’un autre côté, quand la religion ne se joint pas à la conscience morale, elle est aussi sans effet. Comme on l’a déjà dit, la religion, sans la conscience morale est un culte superstitieux. On pense servir Dieu en le louant, par exemple, en célébrant sa puissance, sa sagesse, sans songer à remplir les lois divines, sans même connaître cette sagesse et cette puissance et sans les étudier. On cherche dans ces louanges comme un narcotique pour sa conscience, ou comme un oreiller sur lequel on espère reposer tranquillement.

KANT

1996SANTILLESREMPLACEMENTN’a-t-on pas un mot qui désignerait, non une jouissance comme le mot bonheur, mais qui cependant indiquerait une satisfaction liée à notre existence, un analogue du bonheur qui doit nécessairement accompagner la conscience de la vertu ? Si ! ce mot existe, c’est contentement de soi-même, qui au sens propre ne désigne jamais qu’une satisfaction négative liée à l’existence, par laquelle on a conscience de n’avoir besoin de rien. La liberté et la conscience de la liberté, comme conscience d’un pouvoir que nous avons de suivre, avec une intention inébranlable, la loi morale, est l’indépendance à l’égard des penchants, du moins comme causes déterminantes (sinon comme causes affectives) de notre désir, et en tant que je suis conscient de cette indépendance dans l’exécution de mes maximes morales, elle est l’unique source d’un contentement immuable, nécessairement lié avec elle, ne reposant sur aucun sentiment particulier, et qui peut s’appeler intellectuel. Le contentement sensible (qui est ainsi appelé improprement) qui repose sur la satisfaction des penchants, si raffinés qu’on les imagine, ne peut jamais être adéquat à ce qu’on se représente. Car les penchants changent, croissent avec la satisfaction qu’on leur accorde et ils laissent toujours un vide plus grand encore que celui qu’on a cru remplir.

KANT

1996TECHN.GROUPEMENTS I-IVNORMALEPeut-on échapper aux exigences de la conscience ?
1996LGROUPEMENTS II-IIINORMALELa conscience de soi est-elle une connaissance ?
1996TECHN.GROUPEMENTS II-IIISECOURSQu’arrive-t-il quand une de nos actions cesse d’être spontanée pour devenir automatique ? La conscience s’en retire. Dans l’apprentissage d’un exercice, par exemple, nous commençons par être conscients de chacun des mouvements que nous exécutons, parce qu’il vient de nous, parce qu’il résulte d’une décision et implique un choix, puis à mesure que ces mouvements s’enchaînent davantage entre eux et se déterminent plus mécaniquement les uns les autres, nous dispensant ainsi de nous décider et de choisir, la conscience que nous en avons diminue et disparaît. Quels sont, d’autre part, les moments où notre conscience atteint le plus de vivacité ? Ne sont-ce pas les moments de crise intérieure, où nous hésitons entre deux et plusieurs partis à prendre, où nous sentons que notre avenir sera ce que nous l’aurons fait ? Les variations d’intensité de notre conscience semblant donc bien correspondre à la somme plus ou moins considérable de choix ou, si vous voulez, de création, que nous distribuons sous notre conduite. Tout porte à croire qu’il en est ainsi de la conscience en général.

BERGSON


QUESTIONS :

1° Dégagez l’idée principale du texte et précisez la structure de son argumentation.
2° Expliquez :
a) "La conscience s’en retire" ;
b) "à mesure que ces mouvements s’enchaînent davantage entre eux et se déterminent plus mécaniquement les uns les autres" ;
c) "les moments de crise intérieure où nous hésitons entre deux ou plusieurs partis à prendre, où nous sentons que notre avenir sera ce que nous l’aurons fait".
3° Dans une discussion argumentée et progressive, vous vous demanderez ce qui provoque l’éveil de la conscience.

1996SLA RÉUNIONNORMALELa vie quotidienne, pour ses fins variables et relatives, peut se contenter d’évidences et de vérités relatives. La science, elle, veut des vérités variables une fois pour toutes et pour tous, définitives, et donc des vérifications nouvelles et ultimes. Si, en fait, comme elle-même doit finir par s’en convaincre, la science ne réussit pas à édifier un système de vérités absolues, si elle doit sans arrêt modifier les vérités acquises, elle obéit cependant à l’idée de vérité absolue, de vérité scientifique, et elle tend par là vers un horizon infini d’approximations qui convergent toutes vers cette idée. A l’aide de ces approximations, elle croit pouvoir dépasser la conscience naïve et aussi se dépasser infiniment elle-même. Elle croit le pouvoir aussi par la fin qu’elle se pose, à savoir l’universalité systématique de la connaissance.

HUSSERL

1996ESMÉTROPOLE + LA RÉUNIONREMPLACEMENTQuand les enfants commencent à parler, ils pleurent moins. Ce progrès est naturel : un langage est substitué à l’autre. Sitôt qu’ils peuvent dire qu’ils souffrent avec des paroles, pourquoi le diraient-ils avec des cris, si ce n’est quand la douleur est trop vive pour que la parole puisse l’exprimer ? S’ils continuent alors à pleurer, c’est la faute des gens qui sont autour d’eux. Dès qu’une fois Emile* aura dit : J’ai mal, il faudra des douleurs biens vives pour le forcer de pleurer.Un autre progrès rend aux enfants la plainte moins nécessaire : c’est celui de leurs forces. Pouvant plus par eux-mêmes, ils ont un besoin moins fréquent de recourir à autrui. Avec leur force se développe la connaissance qui les met en état de la diriger. C’est à ce second degré que commence proprement la vie de l’individu ; c’est alors qu’il prend la conscience de lui-même.

ROUSSEAU

1996TECHN.POLYNÉSIEREMPLACEMENTQu’arrive-t-il quand une de nos actions cesse d’être spontanée pour devenir automatique ? La conscience s’en retire. Dans l’apprentissage d’un exercice, par exemple, nous commençons par être conscients de chacun des mouvements que nous exécutons, parce qu’il vient de nous, parce qu’il résulte d’une décision et implique un choix, puis, à mesure que ces mouvements s’enchaînent davantage entre eux et se déterminent plus mécaniquement les uns les autres, nous dispensant ainsi de nous décider et de choisir, la conscience que nous en avons diminue et disparaît. Quels sont, d’autre part, les moments où notre conscience atteint le plus de vivacité ? Ne sont-ce pas les moments de crise intérieure, où nous hésitons entre deux ou plusieurs partis à prendre, où nous sentons que notre avenir sera ce que nous l’aurons fait. Les variations d’intensité de notre conscience semblent donc bien correspondre à la somme plus ou moins considérable de choix ou, si vous voulez, de création, que nous distribuons sur notre conduite. Tout porte à croire qu’il en est ainsi de la conscience en général. Si conscience signifie mémoire et anticipation, c’est que conscience est synonyme de choix.

BERGSON

QUESTIONS :

1° Dégagez la thèse du texte et l’argumentation.
2° Expliquez :
a) “Dans l’apprentissage d’un exercice, par exemple, nous commençons par être conscients de chacun des mouvements que nous exécutons, parce qu’il vient de nous”.
b) "conscience est synonyme de choix" ;
3° Est-ce dans l’hésitation que nous sommes le plus conscients ?

1997SAMÉRIQUE DU NORDNORMALEQue soit vrai tout ce que l’on dit tant aux autres qu’à soi-même, c’est ce qu’il est impossible de garantir dans tous les cas, parce qu’on peut se tromper ; mais que ce soit sincère, c’est ce que l’on peut et doit toujours garantir, parce qu’on s’en rend compte immédiatement. Dans le premier cas, il faut, par un jugement logique de la raison, confronter l’affirmation avec l’objet ; dans le second, à l’instant où l’on constate sa conviction, on confronte devant la conscience l’affirmation avec le sujet. Si l’on pose l’affirmation par rapport à l’objet sans s’être assuré qu’on peut la poser aussi par rapport au sujet, on avance autre chose que ce dont on est convaincu, on ment (...).Les moralistes parlent d’une conscience fausse, mais ils disent une absurdité. Si une pareille conscience existait, personne ne serait plus jamais assuré d’avoir bien agi, puisque le juge en dernier ressort lui-même pourrait se tromper. Il m’arrive sans doute de me tromper dans le jugement qui me fait croire que j’ai raison ; mais ce jugement procède de l’intelligence, et celle-ci se borne, d’une manière exacte ou erronée, à juger objectivement. Mais dans ce sentiment intime : je crois avoir raison, ou : je fais semblant de le croire, je ne puis absolument pas me tromper, puisque ce jugement, ou mieux cette phrase n’est que l’expression de ce sentiment même.

KANT

1997ESÉTRANGER GROUPE 1NORMALEC’est une erreur de distinguer les passions en permises et défendues, pour se livrer aux premières et se refuser aux autres. Toutes sont bonnes quand on en reste le maître ; toutes sont mauvaises quand on s’y laisse assujettir. Ce qui nous est défendu par la nature, c’est d’étendre nos attachements plus loin que nos forces : ce qui nous est défendu par la raison, c’est de vouloir ce que nous ne pouvons obtenir, ce qui nous est défendu par la conscience n’est pas d’être tentés, mais de nous laisser vaincre aux tentations. Il ne dépend pas de nous d’avoir ou de n’avoir pas de passions, mais il dépend de nous de régner sur elles. Tous sentiments que nous dominons sont légitimes ; tous ceux qui nous dominent sont criminels. Un homme n’est pas coupable d’aimer la femme d’autrui, s’il tient cette passion malheureuse asservie à la loi du devoir ; il est coupable d’aimer sa propre femme au point d’immoler tout à son amour.

ROUSSEAU

1997TECHN.GROUPEMENTS II-IIINORMALELa conscience d’être libre peut-elle être illusoire ?
1997ESJAPONNORMALERadicale est la différence entre la conscience de l’animal, même le plus intelligent, et la conscience humaine. Car la conscience correspond exactement à la puissance de choix dont l’être dispose, elle est coextensive (1) à la frange d’action possible qui entoure l’action réelle : conscience est synonyme d’invention et de liberté. Or, chez l’animal, l’invention n’est jamais qu’une variation sur le thème de la routine. Enfermé dans les habitudes de l’espèce, il arrivera sans doute à les élargir par son initiative individuelle ; mais il n’échappe à l’automatisme que pour un instant, juste le temps de créer un automatisme nouveau : les portes de sa prison se referment aussitôt ouvertes ; en tirant sur sa chaîne, il ne réussit qu’à l’allonger. Avec l’homme, la conscience brise la chaîne. Chez l’homme, et chez l’homme seulement, elle se libère.

BERGSON

(1) coextensive : dont l’étendue coïncide avec

1997TECHN.LA RÉUNIONNORMALELa conscience est-elle ce qui me rend libre ?
1998SLIBANNORMALEL’histoire humaine peut bien, dans ses passions, dans ses préjugés, dans tout ce qui relève des impulsions immédiates, être un éternel recommencement ; mais il y a des pensées qui ont été rectifiées, élargies, complétées. Elles ne retournent pas à leur aire restreinte ou chancelante. Or l’esprit scientifique est essentiellement une rectification du savoir, un élargissement des cadres de la connaissance. Il juge son passé historique en le condamnant. Sa structure est la conscience de ses fautes historiques. Scientifiquement, on pense le vrai comme rectification historique d’une longue erreur, on pense l’expérience comme rectification de l’illusion commune et première [...]. L’essence même de la réflexion, c’est de comprendre qu’on n’avait pas compris.

BACHELARD

1999LPOLYNÉSIENORMALEEn ce moment je cause avec vous, je prononce le mot "causerie". Il est clair que ma conscience se représente ce mot tout d’un coup (1) ; sinon, elle n’y verrait pas un mot unique, elle ne lui attribuerait pas un sens. Pourtant, lorsque j’articule la dernière syllabe du mot, les deux premières ont été articulées déjà ; elles sont du passé par rapport à celle-là, qui devrait alors s’appeler du présent. Mais cette dernière syllabe "rie", je ne l’ai pas prononcée instantanément ; le temps, si court soit-il, pendant lequel je l’ai émise, est décomposable en parties, et ces parties sont du passé par rapport à la dernière d’entre elles, qui serait, elle, du présent définitif si elle n’était décomposable à son tour : de sorte que vous aurez beau faire, vous ne pourrez tracer une ligne de démarcation entre le passé et le présent, ni par conséquent entre la mémoire et la conscience. A vrai dire, quand j’articule le mot "causerie", j’ai présents à l’esprit non seulement le commencement, le milieu et la fin du mot, mais encore les mots qui ont précédé, mais encore tout ce que j’ai déjà prononcé de la phrase ; sinon, j’aurais perdu le fil de mon discours. Maintenant, si la ponctuation du discours eût été différente, ma phrase eût pu commencer plus tôt ; elle eût englobé, par exemple, la phrase précédente, et mon "présent" se fût dilaté encore davantage dans le passé. Poussons ce raisonnement jusqu’au bout : supposons que mon discours dure depuis des années, depuis le premier éveil de ma conscience, qu’il se poursuive en une phrase unique, et que ma conscience soit assez détachée de l’avenir, assez désintéressée de l’action, pour s’employer exclusivement à embrasser le sens de la phrase : je ne chercherais pas plus d’explication, alors, à la conservation intégrale de cette phrase que je n’en cherche à la survivance des deux premières syllabes du mot "causerie" quand je prononce la dernière. Or, je crois bien que notre vie intérieure tout entière est quelque chose comme une phrase unique entamée dès le premier éveil de la conscience, phrase semée de virgules, mais nulle part coupée par des points.

BERGSON

(1) "tout d’un coup" : d’un seul coup

1999SPOLYNÉSIENORMALES’écoulant dans le lit assuré du bon sens, la philosophie naturelle (1) produit au mieux une rhétorique de vérités triviales. Lui reproche-t-on l’insignifiance de ce qu’elle présente, elle assure en réplique que le sens et le contenu sont présents dans son coeur et doivent être aussi dans le coeur des autres ; elle a en effet, à son avis, prononcé l’ultime parole en parlant de l’innocence du coeur et de la pureté de la conscience morale, à quoi on ne peut rien objecter, et au-delà de quoi on ne peut rien demander. Cependant, ce qu’il fallait faire c’était ne pas laisser le meilleur au fond du coeur, mais le tirer du puits pour l’exposer à la lumière du jour. (...) Puisque le sens commun fait appel au sentiment, son oracle intérieur, il rompt tout contact avec qui n’est pas de son avis, il est ainsi contraint d’expliquer qu’il n’a rien d’autre à dire à celui qui ne trouve pas et ne sent pas en soi-même la même vérité ; en d’autres termes, il foule aux pieds la racine de l’humanité, car la nature de l’humanité, c’est de tendre à l’accord mutuel ; son existence est seulement dans la communauté instituée des consciences.

HEGEL

(1) "philosophie naturelle" : façon de penser du sens commun

1999STUNISIESECOURSL’esprit a une structure variable dès l’instant où la connaissance a une histoire. En effet, l’histoire humaine peut bien, dans ses passions, dans ses préjugés, dans tout ce qui relève des impulsions immédiates, être un éternel recommencement ; mais il y a des pensées qui ne recommencent pas ; ce sont les pensées qui ont été rectifiées, élargies, complétées. Elles ne retournent pas à leur aire restreinte ou chancelante. Or l’esprit scientifique est essentiellement une rectification du savoir, un élargissement des cadres de la connaissance. Il juge son passé historique en le condamnant. Sa structure est la conscience de ses fautes historiques. Scientifiquement, on pense le vrai comme rectification historique d’une longue erreur, on pense l’expérience comme rectification de l’illusion commune et première.

BACHELARD

2000TECHN.ANTILLESREMPLACEMENTEst-ce par la conscience qu’il faut définir l’homme ?
2000TECHN.MÉTROPOLEREMPLACEMENTL’expérience de l’oeuvre d’art modifie-t-elle la conscience que nous avons du monde ?
2000SNOUVELLE-CALÉDONIENORMALEUne doctrine inconciliable avec la société civile, c’est que chaque fois qu’un homme agit contre sa conscience, c’est une faute. Cette doctrine repose sur la présomption par laquelle on se fait soi-même juge du bien et du mal. En effet, la conscience d’un homme et son jugement, c’est tout un. Et la conscience, comme le jugement, peut être erronée. En conséquence, encore que celui qui n’est pas assujetti à la loi civile commette une faute chaque fois qu’il agit contre sa conscience (puisqu’il n’a pas d’autre règle à suivre que sa propre raison), il n’en va pas de même de celui qui vit dans une République, car la loi est alors la conscience publique, par laquelle il a antérieurement accepté d’être guidé. S’il n’en est pas ainsi, étant donné la diversité des consciences privées, qui ne sont rien d’autre que des opinions privées, la République sera nécessairement divisée, et nul ne s’aventurera à obéir au pouvoir souverain au-delà de ce qui aura trouvé grâce à ses propres yeux.

HOBBES

2001TECHN.ANTILLESNORMALELa conscience n’est-elle tournée que vers elle-même ?
2001ESANTILLESREMPLACEMENTCette idée de la personnalité qui éveille le respect, qui nous met devant les yeux la sublimité de notre nature (d’après sa détermination), en nous faisant remarquer en même temps le défaut d’accord de notre conduite avec elle, et en abaissant par cela même la présomption, est naturelle, même à la raison humaine la plus commune, et aisément remarquée. Tout homme, même médiocrement honorable, n’a-t-il pas trouvé quelquefois qu’il s’est abstenu d’un mensonge, d’ailleurs inoffensif, par lequel il pouvait ou se tirer lui-même d’une affaire désagréable ou procurer quelque avantage à un ami cher et plein de mérite, pour avoir le droit de ne pas se mépriser en secret à ses propres yeux ? Dans les grands malheurs de la vie, qu’il aurait pu éviter en se mettant au-dessus du devoir, un honnête homme n’est-il pas soutenu par la conscience d’avoir en sa personne maintenu l’humanité dans sa dignité, de l’avoir honorée, de n’avoir pas de raison de rougir de lui-même à ses propres yeux et de craindre le spectacle intérieur de l’examen de conscience ?

KANT

2001TECHN.MÉTROPOLE + LA RÉUNIONREMPLACEMENTTout homme a une conscience et se trouve observé, menacé, de manière générale tenu en respect (respect lié à la crainte) par un juge intérieur et cette puissance qui veille en lui sur les lois n’est pas quelque chose de forgé (arbitrairement) par lui-même, mais elle est inhérente à son être. Elle le suit comme son ombre quand il pense lui échapper. Il peut sans doute par des plaisirs ou des distractions s’étourdir ou s’endormir, mais il ne saurait éviter parfois de revenir à soi ou de se réveiller, dès qu’il en perçoit la voix terrible. Il est bien possible à l’homme de tomber dans la plus extrême abjection où il ne se soucie plus de cette voix, mais il ne peut jamais éviter de l’entendre.

KANT


QUESTIONS :

1° Dégagez l’idée générale du texte et les étapes de son argumentation.
2° Expliquez : "il ne saurait éviter parfois de revenir à soi ou de se réveiller".
3° Peut-on s’affranchir de la conscience morale ?

2002LAMÉRIQUE DU NORDNORMALEUne doctrine inconciliable avec la société civile, c’est que chaque fois qu’un homme agit contre sa conscience c’est une faute. Cette doctrine repose sur la présomption par laquelle on se fait soi-même juge du bien et du mal. En effet, la conscience d’un homme, et son jugement, c’est tout un. Et la conscience, comme le jugement, peut être erronée. En conséquence, encore que celui qui n’est pas assujetti à la loi civile commette une faute chaque fois qu’il agit contre sa conscience (puisqu’il n’a pas d’autre règle à suivre que sa propre raison), il n’en va pas de même de celui qui vit dans une République, car la loi est alors la conscience publique, par laquelle il a antérieurement accepté d’être guidé. S’il n’en est pas ainsi, étant donné la diversité des consciences privées, qui ne sont rien d’autre que des opinions privées, la République sera nécessairement divisée, et nul ne s’aventurera à obéir au pouvoir souverain au-delà de ce qui aura trouvé grâce à ses propres yeux.

HOBBES
Léviathan

2002LAMÉRIQUE DU SUDNORMALEL’influence du langage sur la sensation est plus profonde qu’on ne le pense généralement. Non seulement le langage nous fait croire à l’invariabilité de nos sensations, mais il nous trompera parfois sur le caractère de la sensation éprouvée. Ainsi, quand je mange d’un mets réputé exquis, le nom qu’il porte, gros de l’approbation qu’on lui donne, s’interpose entre ma sensation et ma conscience ; je pourrai croire que la saveur me plaît, alors qu’un léger effort d’attention me prouverait le contraire. Bref, le mot aux contours bien arrêtés, le mot brutal, qui emmagasine ce qu’il y a de stable, de commun et par conséquent d’impersonnel dans les impressions de l’humanité, écrase ou tout au moins recouvre les impressions délicates et fugitives de notre conscience individuelle. Pour lutter à armes égales, celles-ci devraient s’exprimer par des mots précis ; mais ces mots, à peine formés, se retourneraient contre la sensation qui leur donna naissance, et inventés pour témoigner que la sensation est instable, ils lui imposeraient leur propre stabilité

.BERGSON
Essai sur les données immédiates de la conscience

2002TECHN.INDENORMALEL’histoire est pour l’espèce humaine ce que la raison est pour l’individu. Grâce à sa raison, l’homme n’est pas renfermé comme l’animal dans les limites étroites du présent visible ; il connaît encore le passé infiniment plus étendu, source du présent qui s’y rattache : c’est cette connaissance seule qui lui procure une intelligence plus nette du présent et lui permet même de formuler des inductions pour l’avenir (1). L’animal, au contraire, dont la connaissance sans réflexion est bornée à l’intuition, et par suite au présent, erre parmi les hommes, même une fois apprivoisé, ignorant, engourdi, stupide, désarmé et esclave. De même un peuple qui ne connaît pas sa propre histoire est borné au présent de la génération actuelle : il ne comprend ni sa nature, ni sa propre existence, dans l’impossibilité où il est de les rapporter à un passé qui les explique ; il peut moins encore anticiper sur l’avenir. Seule l’histoire donne à un peuple une entière conscience de lui-même. L’histoire peut donc être regardée comme la conscience raisonnée de l’espèce humaine ; elle est à l’humanité ce qu’est à l’individu la conscience soutenue par la raison, réfléchie et cohérente, dont le manque condamne l’animal à rester enfermé dans le champ étroit du présent intuitif.

SCHOPENHAUER

(1) Induire pour l’avenir : étendre à l’avenir ce que nous apprend le présent.


QUESTIONS :

1° Dégagez l’idée principale du texte et les étapes de son argumentation.

a) Expliquez pourquoi l’animal est renfermé "dans les limites étroites du présent visible" par opposition à l’homme ;
b) Pourquoi l’histoire joue-t-elle, pour un peuple, le même rôle que la "conscience soutenue par la raison pour un individu" ?
3° Qu’est-ce que la connaissance de son passé apporte à un peuple ?

2003SAMÉRIQUE DU NORDNORMALELa conscience est le savoir revenant sur lui-même et prenant pour centre la personne humaine elle-même, qui se met en demeure de décider et de se juger. Ce mouvement intérieur est dans toute pensée : car celui qui ne se dit pas finalement "Que dois-je penser ?" ne peut pas être dit penser. La conscience est toujours implicitement morale ; et l’immoralité consiste toujours à ne point vouloir penser qu’on pense, et à ajourner le jugement intérieur. On nomme bien inconscients ceux qui ne se posent aucune question d’eux-mêmes à eux-mêmes. Ce qui n’exclut pas les opinions sur les opinions et tous les savoir-faire, auxquels il manque la réflexion, c’est-à-dire le recul en soi-même qui permet de se connaître et de se juger, et cela est proprement la conscience.Rousseau disait bien que la conscience ne se trompe jamais, pourvu qu’on l’interroge. Exemple : ai-je été lâche en telle circonstance ? Je le saurai si je veux y regarder. Ai-je été juste en tel arrangement ? Je n’ai qu’à m’interroger : mais j’aime bien mieux m’en rapporter à d’autres.

ALAIN
Définitions.

2003ESANTILLESNORMALELa pensée n’est rien d’"intérieur", elle n’existe pas hors du monde et hors des mots. Ce qui nous trompe là-dessus, ce qui nous fait croire à une pensée qui existerait pour soi avant l’expression, ce sont les pensées déjà constituées et déjà exprimées que nous pouvons rappeler à nous silencieusement et par lesquelles nous nous donnons l’illusion d’une vie intérieure. Mais en réalité ce silence prétendu est bruissant de paroles, cette vie intérieure est un langage intérieur. La pensée "pure" se réduit à un certain vide de la conscience, à un voeu instantané. L’intention significative nouvelle ne se connaît elle-même qu’en se recouvrant de significations déjà disponibles, résultat d’actes d’expression antérieurs. Les significations disponibles s’entrelacent soudain selon une loi inconnue, et une fois pour toutes un nouvel être culturel a commencé d’exister. La pensée et l’expression se constituent donc simultanément.

MERLEAU-PONTY
Phénoménologie de la perception.

2003LMÉTROPOLEREMPLACEMENTQuand je me promène pour la première fois, par exemple, dans une ville où je séjournerai, les choses qui m’entourent produisent en même temps sur moi une impression qui est destinée à durer, et une impression qui se modifiera sans cesse. Tous les jours j’aperçois les mêmes maisons, et comme je sais que ce sont les mêmes objets, je les désigne constamment par le même nom, et je m’imagine aussi qu’elles m’apparaissent toujours de la même manière. Pourtant, si je me reporte, au bout d’un assez long temps, à l’impression que j’éprouvai pendant les premières années, je m’étonne du changement singulier, inexplicable et surtout inexprimable, qui s’est accompli en elle. Il semble que ces objets, continuellement perçus par moi et se peignant sans cesse dans mon esprit, aient fini par m’emprunter quelque chose de mon existence consciente ; comme moi ils ont vécu, et comme moi vieilli. Ce n’est pas là illusion pure ; car si l’impression d’aujourd’hui était absolument identique à celle d’hier, quelle différence y aurait-il entre percevoir et reconnaître, entre apprendre et se souvenir ? Pourtant cette différence échappe à l’attention de la plupart ; on ne s’en apercevra guère qu’à la condition d’en être averti, et de s’interroger alors scrupuleusement soi-même. La raison en est que notre vie extérieure et pour ainsi dire sociale a plus d’importance pratique pour nous que notre existence intérieure et individuelle. Nous tendons instinctivement à solidifier nos impressions, pour les exprimer par le langage. De là vient que nous confondons le sentiment même, qui est dans un perpétuel devenir, avec son objet extérieur permanent, et surtout avec le mot qui exprime cet objet.

BERGSON
Essai sur les données immédiates de la conscience.

2003SMÉTROPOLEREMPLACEMENTLa conscience peut-elle être un fardeau ?
2003ESNOUVELLE-CALÉDONIENORMALELa conscience peut-elle être un obstacle pour l’action ?
2003LNOUVELLE-CALÉDONIENORMALEChacun de nous a sa manière d’aimer et de haïr, et cet amour, cette haine, reflètent sa personnalité tout entière. Cependant le langage désigne ces états par les mêmes mots chez tous les hommes ; aussi n’a-t-il pu fixer que l’aspect objectif et impersonnel de l’amour, de la haine, et des mille sentiments qui agitent l’âme. Nous jugeons du talent d’un romancier à la puissance avec laquelle il tire du domaine public, où le langage les avait ainsi fait descendre, des sentiments et des idées auxquels il essaie de rendre, par une multiplicité de détails qui se juxtaposent, leur primitive et vivante individualité. Mais de même qu’on pourra intercaler indéfiniment des points entre deux positions d’un mobile sans jamais combler l’espace parcouru, ainsi, par cela seul que nous parlons, par cela seul que nous associons des idées les unes aux autres et que ces idées se juxtaposent au lieu de se pénétrer, nous échouons à traduire entièrement ce que notre âme ressent : la pensée demeure incommensurable avec le langage.

BERGSON
Essai sur les données immédiates de la conscience.

2003TECHN.NOUVELLE-CALÉDONIENORMALELe sensible dans l’art ne concerne que ceux de nos sens qui sont intellectualisés : la vue et l’ouïe, à l’exclusion de l’odorat, du goût et du toucher. Car l’odorat, le goût et le toucher n’ont affaire qu’à des éléments matériels et à leurs qualités immédiatement sensibles, l’odorat à l’évaporation de particules matérielles dans l’air, le goût à la dissolution de particules matérielles, le toucher au froid, au chaud, au lisse, etc. Ces sens n’ont rien à faire avec les objets de l’art qui doivent se maintenir dans une réelle indépendance et ne pas se borner à offrir des relations sensibles. Ce que ces sens trouvent agréable n’est pas le beau que connaît l’art. C’est donc à dessein que l’art crée un royaume d’ombres, de formes, de tonalités, d’intuitions ; ces formes et ces tonalités sensibles, l’art ne les fait pas seulement intervenir pour elles-mêmes et sous leur apparence immédiate, mais encore afin de satisfaire des intérêts spirituels supérieurs, parce qu’ils sont capables de faire naître une résonance dans les profondeurs de la conscience, un écho dans l’esprit.

HEGEL


QUESTIONS :

1° Dégager l’idée principale du texte et les étapes de son argumentation.
2° Répondre aux questions suivantes en prenant appui sur le texte
a) Pourquoi les sens "non intellectualisés" n’ont-ils rien à faire avec l’art ?
b) En quoi le beau nous élève-t-il au-dessus de l’agréable ?
3° Qu’est-ce qui nous plaît dans une oeuvre d’art ?

2004LANTILLESNORMALEChacun de nous est un corps soumis aux mêmes lois que toutes les autres portions de matière. Si on le pousse, il avance ; si on le tire, il recule, si on le soulève et qu’on l’abandonne, il retombe. Mais, à côté de ces mouvements qui sont provoqués mécaniquement par une cause extérieure, il en est d’autres qui semblent venir du dedans et qui tranchent sur les précédents par leur caractère imprévu : on les appelle "volontaires". Quelle en est la cause ? C’est ce que chacun de nous désigne par les mots "je" ou "moi". Et qu’est-ce que le moi ? Quelque chose qui paraît, à tort ou à raison, déborder de toutes parts le corps qui y est joint, le dépasser dans l’espace aussi bien que dans le temps. Dans l’espace d’abord, car le corps de chacun de nous s’arrête aux contours précis qui le limitent, tandis que par notre faculté de percevoir, et plus particulièrement de voir, nous rayonnons bien au-delà de notre corps : nous allons jusqu’aux étoiles. Dans le temps ensuite, car le corps est matière, la matière est dans le présent et, s’il est vrai que le passé y laisse des traces, ce ne sont des traces de passé que pour une conscience qui les aperçoit et qui interprète ce qu’elle aperçoit à la lumière de ce qu’elle se remémore : la conscience, elle, retient ce passé, l’enroule sur lui-même au fur et à mesure que le temps se déroule et prépare avec lui un avenir qu’elle contribuera à créer.

BERGSON
L’Énergie spirituelle.

2004ESANTILLESREMPLACEMENTSi, comme je le crois, les sentiments moraux ne sont pas innés, mais acquis, ils n’en sont pas moins, pour cela, naturels. Il est naturel à l’homme de parler, de raisonner, de bâtir des villes, de cultiver le sol, quoique ce soient là des facultés acquises. Les sentiments moraux, à la vérité, ne font pas partie de notre nature, si on entend par là qu’ils devraient être présents chez nous tous, à un degré appréciable quelconque ; fait regrettable, sans doute, et reconnu par ceux qui croient le plus fortement à l’origine transcendante de ces sentiments. Cependant, comme les autres aptitudes acquises, la faculté morale, si elle ne fait pas partie de notre nature, s’y développe naturellement ; comme les autres facultés, elle est capable de prendre naissance spontanément, et, très faible au début, elle peut être portée par la culture à un haut degré de développement. Malheureusement aussi, en recourant autant qu’il est nécessaire aux sanctions extérieures et en utilisant l’influence des premières impressions, on peut la développer dans n’importe quelle direction, ou presque ; en sorte qu’il n’y a guère d’idée, si absurde ou si malfaisante qu’elle soit, qu’on ne puisse imposer à l’esprit humain en lui donnant, par le jeu de ces influences, toute l’autorité de la conscience.

MILL
De l’Utilitarisme.

2004SLIBANNORMALEDes chercheurs, qui ne refuse pas de reconnaître les faits psychanalytiques, mais ne veulent pas admettre l’inconscient, se tirent d’affaire à l’aide du fait incontesté que la conscience aussi - en tant que phénomène - présente une large échelle de gradation dans l’intensité ou la clarté. De même qu’il y a des processus qui sont conscients d’une façon très vive, très aiguë et très saisissable, de même l’expérience vécue nous en présente d’autres qui ne sont conscients que d’une façon faible et même à peine discernable ; et les plus faiblement conscients d’entre eux seraient précisément ceux pour lesquels la psychanalyse prétend employer le terme impropre d’inconscient. Ces processus seraient néanmoins conscients eux aussi ou "dans la conscience", et pourraient être rendus pleinement et fortement conscients si on leur accordait une attention suffisante.Pour autant que des arguments puissent avoir une influence sur la décision dans une telle question qui dépend ou bien d’une convention ou bien de facteurs affectifs, on peut ajouter ici les remarques suivantes : la référence à une échelle de clarté dans le fait d’être conscient n’a rien de contraignant et n’a pas plus de force démonstrative que les propositions de ce genre : il y a tant de degrés d’éclairement depuis la lumière la plus vive et aveuglante jusqu’à la faible lueur que, par conséquent, il n’y a absolument pas d’obscurité. [...] En outre, en subsumant l’imperceptible sous le conscient (1), on n’aboutit qu’à porter atteinte à la seule et unique certitude immédiate qui soit dans le psychique. Une conscience dont on ne sait rien, cela me paraît beaucoup plus absurde qu’un psychique inconscient.

FREUD
Le Moi et le ça.

(1) en subsumant l’imperceptible sous le conscient : : en comprenant dans le conscient.

2004SPOLYNÉSIENORMALEC’est la société qui trace à l’individu le programme de son existence quotidienne. On ne peut vivre en famille, exercer sa profession, vaquer aux mille soins de la vie journalière, faire ses emplettes, se promener dans la rue ou même rester chez soi, sans obéir à des prescriptions et se plier à des obligations. Un choix s’impose à tout instant ; nous optons naturellement pour ce qui est conforme à la règle. C’est à peine si nous en avons conscience ; nous ne faisons aucun effort. Une route a été tracée par la société ; nous la trouvons ouverte devant nous et nous la suivons ; il faudrait plus d’initiative pour prendre à travers champs. Le devoir, ainsi entendu, s’accomplit presque toujours automatiquement ; et l’obéissance au devoir, si l’on s’en tenait au cas le plus fréquent, se définirait un laisser-aller ou un abandon. D’où vient donc que cette obéissance apparaît au contraire comme un état de tension, et le devoir lui-même comme une chose raide et dure ? C’est évidemment que des cas se présentent où l’obéissance implique un effort sur soi-même. Ces cas sont exceptionnels ; mais on les remarque, parce qu’une conscience intense les accompagne, comme il arrive pour toute hésitation ; à vrai dire, la conscience est cette hésitation même.

BERGSON
Les deux Sources de la morale et de la religion.

2004SPOLYNÉSIEREMPLACEMENTTout animal a des idées puisqu’il a des sens, il combine même ses idées jusqu’à un certain point, et l’homme ne diffère à cet égard de la bête que du plus au moins : quelques philosophes ont même avancé qu’il y a plus de différence de tel homme à tel homme que de tel homme à telle bête ; ce n’est donc pas tant l’entendement qui fait parmi les animaux la distinction spécifique de l’homme que sa qualité d’agent libre. La nature commande à tout animal, et la bête obéit. L’homme éprouve la même impression, mais il se reconnaît libre d’acquiescer, ou de résister ; et c’est surtout dans la conscience de cette liberté que se montre la spiritualité de son âme : car la physique explique en quelque manière le mécanisme des sens et la formation des idées ; mais dans la puissance de vouloir ou plutôt de choisir, et dans le sentiment de cette puissance on ne trouve que des actes purement spirituels, dont on n’explique rien par les lois de la mécanique.

ROUSSEAU
Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes

2005SANTILLESNORMALEOn admet généralement que l’identité de la personne repose sur celle de la conscience. Si on entend uniquement par cette dernière le souvenir coordonné du cours de notre vie, elle ne suffit pas à expliquer l’autre. Sans doute nous savons un peu plus de notre vie passée que d’un roman lu autrefois ; mais ce que nous en savons est pourtant peu de chose. Les événements principaux, les scènes intéressantes se sont gravés dans la mémoire ; quant au reste, pour un événement retenu, mille autres sont tombés dans l’oubli. Plus nous vieillissons, et plus les faits de notre vie passent sans laisser de trace. Un âge très avancé, une maladie, une lésion du cerveau, la folie peuvent nous priver complètement de mémoire. Mais l’identité de la personne ne s’est pas perdue avec cet évanouissement progressif du souvenir. Elle repose sur la volonté identique, et sur le caractère immuable que celle-ci présente. C’est cette même volonté qui confère sa persistance à l’expression du regard. L’homme se trouve dans le coeur, non dans la tête.

SCHOPENHAUER
Le Monde comme volonté et représentation

2005ESANTILLESREMPLACEMENTL’art nous procure, d’une part, l’expérience de la vie réelle, nous transporte dans des situations que notre expérience personnelle ne nous fait pas et ne nous fera peut-être jamais connaître les expériences des personnes qu’il représente, et, grâce à la part que nous prenons à ce qui arrive à ces personnes, nous devenons capables de ressentir plus profondément ce qui se passe en nous-mêmes. D’une façon générale, le but de l’art consiste à rendre accessible à l’intuition ce qui existe dans l’esprit humain, la vérité que l’homme abrite dons son esprit, ce qui remue la poitrine humaine et agite l’esprit humain. C’est ce que l’art a pour tâche de représenter, et il le fait au moyen de l’apparence qui, comme telle, nous est indifférente, dès l’instant où elle sert à éveiller en nous le sentiment et la conscience de quelque chose de plus élevé. C’est ainsi que l’art renseigne l’homme sur l’humain, éveille des sentiments endormis, nous met en présence des vrais intérêts de l’esprit. Nous voyons ainsi que l’art agit en remuant, dans leur profondeur, leur richesse et leur variété, tous les sentiments qui s’agitent dans l’âme humaine, et en intégrant dans le champ de notre expérience ce qui se passe dans les régions intimes de cette âme.

HEGEL
Esthétique.

2005SINDENORMALELa conscience de ce que nous sommes peut-elle faire obstacle à notre bonheur ?
2005LPOLYNÉSIENORMALEMais comment le passé, qui, par hypothèse, a cessé d’être, pourrait-il par lui-même se conserver ? N’y a-t-il pas là une contradiction véritable ? - Nous répondons que la question est précisément de savoir si le passé a cessé d’exister, ou s’il a simplement cessé d’être utile. Vous définissez arbitrairement le présent ce qui est, alors que le présent est simplement ce qui se fait. Rien n’est moins que le moment présent, si vous entendez par là cette limite indivisible qui sépare le passé de l’avenir. Lorsque nous pensons ce présent comme devant être, il n’est pas encore ; et quand nous le pensons comme existant, il est déjà passé. Que si, au contraire, vous considérez le présent concret et réellement vécu par la conscience, on peut dire que ce présent consiste en grande partie dans le passé immédiat. Dans la fraction de seconde que dure la plus courte perception possible de lumière, des trillions de vibrations ont pris place, dont la première est séparée de la dernière par un intervalle énormément divisé. Votre perception, si instantanée soit-elle, consiste donc en une incalculable multitude d’éléments remémorés, et, à vrai dire, toute perception est déjà mémoire. Nous ne percevons, pratiquement, que le passé, le présent pur étant l’insaisissable progrès du passé rongeant l’avenir.

BERGSON
Matière et mémoire

2007SÉTRANGER GROUPE 1NORMALENous sommes libres quand nos actes émanent de notre personnalité entière, quand ils l’expriment, quand ils ont avec elle cette indéfinissable ressemblance qu’on trouve parfois entre l’oeuvre et l’artiste. En vain on alléguera que nous cédons alors à l’influence toute-puissante de notre caractère. Notre caractère, c’est encore nous ; et parce qu’on s’est plu à scinder la personne en deux parties pour considérer tour à tour, par un effort d’abstraction, le moi qui sent ou pense et le moi qui agit, il y aurait quelque puérilité à conclure que l’un des deux moi pèse sur l’autre. Le même reproche s’adressera à ceux qui demandent si nous sommes libres de modifier notre caractère. Certes, notre caractère se modifie insensiblement tous les jours, et notre liberté en souffrirait, si ces acquisitions nouvelles venaient se greffer sur notre moi et non pas se fondre en lui. Mais, dès que cette fusion aura lieu, on devra dire que le changement survenu dans notre caractère est bien nôtre, que nous nous le sommes approprié. En un mot, si l’on convient d’appeler libre tout acte qui émane du moi, et du moi seulement, l’acte qui porte la marque de notre personne est véritablement libre, car notre moi seul en revendiquera la paternité.

BERGSON
Essai sur les données immédiates de la conscience

2007LLA RÉUNIONNORMALEDemandons-nous quels sont les êtres conscients et jusqu’où le domaine de la conscience s’étend dans la nature. Mais n’exigeons pas ici l’évidence complète, rigoureuse, mathématique ; nous n’obtiendrions rien. Pour savoir de science certaine qu’un être est conscient, il faudrait pénétrer en lui, coïncider avec lui, être lui. Je vous défie de prouver, par expérience ou par raisonnement, que moi, qui vous parle en ce moment, je sois un être conscient. Je pourrais être un automate ingénieusement construit par la nature, allant, venant, discourant ; les paroles mêmes par lesquelles je me déclare conscient pourraient être prononcées inconsciemment. Toutefois, si la chose n’est pas impossible, vous m’avouerez qu’elle n’est guère probable. Entre vous et moi il y a une ressemblance extérieure évidente ; et de cette ressemblance extérieure vous concluez, par analogie, à une similitude interne. Le raisonnement par analogie ne donne jamais, je le veux bien, qu’une probabilité ; mais il y a une foule de cas où cette probabilité est assez haute pour équivaloir pratiquement à la certitude.

BERGSON
L’Énergie spirituelle

2007LLIBANNORMALENous avons le libre arbitre, non pas quand nous percevons, mais quand nous agissons. Il ne dépend pas de mon arbitre de trouver le miel doux ou amer, mais il ne dépend pas non plus de mon arbitre qu’un théorème proposé m’apparaisse vrai ou faux ; la conscience n’a qu’à examiner ce qui lui apparaît. Lorsque nous décidons de quelque chose, nous avons toujours présentes à l’esprit ou bien une sensation ou une raison actuelles, ou tout au moins un souvenir actuel d’une sensation ou d’une raison passées ; bien qu’en ce dernier cas nous soyons souvent trompés par l’infidélité de la mémoire ou par l’insuffisance de l’attention. Mais la conscience de ce qui est présent ou de ce qui est passé ne dépend nullement de notre arbitre. Nous ne reconnaissons à fa volonté que le pouvoir de commander à l’attention et à l’intérêt ; et ainsi, quoiqu’elle ne fasse pas le jugement en nous, elle peut toutefois y exercer une influence indirecte. Ainsi il arrive souvent que les hommes finissent par croire ce qu’ils voudraient être la vérité, ayant accoutumé leur esprit à considérer avec le plus d’attention les choses qu’ils aiment ; de cette façon ils arrivent à contenter non seulement leur volonté mais encore leur conscience.

LEIBNIZ
Opuscules philosophiques choisis

2007LNOUVELLE-CALÉDONIENORMALEAuxiliaire de l’action, elle [la perception] isole, dans l’ensemble de la réalité, ce qui nous intéresse ; elle nous montre moins les choses mêmes que le parti que nous en pouvons tirer. Par avance elle les classe, par avance elle les étiquette ; nous regardons à peine l’objet, il nous suffit de savoir à quelle catégorie il appartient. Mais, de loin en loin, par un accident heureux, des hommes surgissent dont les sens ou la conscience sont moins adhérents à la vie. La nature a oublié d’attacher leur faculté de percevoir à leur faculté d’agir. Quand ils regardent une chose, ils la voient pour elle, et non plus pour eux. Ils ne perçoivent plus simplement en vue d’agir ; ils perçoivent pour percevoir, - pour rien, pour le plaisir. Par un certain côté d’eux-mêmes, soit par leur conscience soit par un de leurs sens, ils naissent détachés ; et, selon que ce détachement est celui de tel ou tel sens, ou de la conscience, ils sont peintres ou sculpteurs, musiciens ou poètes. C’est donc bien une vision plus directe de la réalité que nous trouvons dans les différents arts ; et c’est parce que l’artiste songe moins à utiliser sa perception qu’il perçoit un plus grand nombre de choses.

BERGSON
La Pensée et le mouvant

2007SPOLYNÉSIEREMPLACEMENTLa conscience de soi rend-elle libre ?
2008SÉTRANGER GROUPE 1NORMALEQue nous dit en effet l’expérience ? Elle nous montre que la vie de l’âme ou, si vous aimez mieux, la vie de la conscience, est liée à la vie du corps, qu’il y a solidarité entre elles, rien de plus. Mais ce point n’a jamais été contesté par personne, et il y a loin de là à soutenir que le cérébral est l’équivalent du mental, qu’on pourrait lire dans un cerveau tout ce qui se passe dans la conscience correspondante. Un vêtement est solidaire du clou auquel il est accroché ; il tombe si l’on arrache le clou ; il oscille si le clou remue ; il se troue, il se déchire si la tête du clou est trop pointue ; il ne s’ensuit pas que chaque détail du clou corresponde à un détail du vêtement, ni que le clou soit l’équivalent du vêtement ; encore moins s’ensuit-il que le clou et le vêtement soient la même chose. Ainsi, la conscience est incontestablement accrochée à un cerveau mais il ne résulte nullement de là que le cerveau dessine tout le détail de la conscience, ni que la conscience soit une fonction du cerveau. Tout ce que l’observation, l’expérience, et par conséquent la science nous permettent d’affirmer, c’est l’existence d’une certaine relation entre le cerveau et la conscience.

BERGSON
L’Énergie spirituelle

2008SINDENORMALELa conscience peut-elle nous tromper ?
2008SJAPONNORMALEIl paraît bien que le bonheur est autre chose qu’une somme de plaisirs. C’est un état général et constant qui accompagne le jeu régulier de toutes nos fonctions organiques et psychiques. Ainsi, les activités continues, comme celles de la respiration et de la circulation, ne procurent pas de jouissances positives ; pourtant, c’est d’elles surtout que dépendent notre bonne humeur et notre entrain. Tout plaisir est une sorte de crise ; il naît, dure un moment et meurt ; la vie, au contraire, est continue. Ce qui en fait le charme fondamental doit être continu comme elle. Le plaisir est local ; c’est une affection limitée à un point de l’organisme ou de la conscience : la vie ne réside ni ici ni là, mais elle est partout. Notre attachement pour elle doit donc tenir à quelque cause également générale. En un mot, ce qu’exprime le bonheur, c’est, non l’état momentané de telle fonction particulière, mais la santé de la vie physique et morale dans son ensemble. Comme le plaisir accompagne l’exercice normal des fonctions intermittentes, il est bien un élément du bonheur, et d’autant plus important que ces fonctions ont plus de place dans la vie. (...) Le plus souvent, au contraire, c’est le plaisir qui dépend du bonheur : suivant que nous sommes heureux ou malheureux, tout nous rit ou nous attriste. On a eu bien raison de dire que nous portons notre bonheur avec nous-mêmes.

DURKHEIM
De la Division du travail social.

2008ESLA RÉUNIONNORMALEChacun de nous est un corps, soumis aux mêmes lois que toutes les autres portions de matière. Si on le pousse, il avance ; si on le tire, il recule ; si on le soulève et qu’on l’abandonne, il retombe. Mais, à côté de ces mouvements qui sont provoqués mécaniquement par une cause extérieure, il en est d’autres qui semblent venir du dedans et qui tranchent sur les précédents par leur caractère imprévu : on les appelle "volontaires". Quelle en est la cause ? C’est ce que chacun de nous désigne par les mots "je" ou "moi". Et qu’est-ce que le moi ? Quelque chose qui paraît, à tort ou à raison, déborder de toutes parts le corps qui y est joint, le dépasser dans l’espace aussi bien que dans le temps. Dans l’espace d’abord, car le corps de chacun de nous s’arrête aux contours précis qui le limitent, tandis que par notre faculté de percevoir, et plus particulièrement de voir, nous rayonnons bien au-delà de notre corps : nous allons jusqu’aux étoiles. Dans le temps ensuite, car le corps est matière, la matière est dans le présent, et, s’il est vrai que le passé y laisse des traces, ce ne sont des traces du passé que pour une conscience qui les aperçoit et qui interprète ce qu’elle aperçoit à la lumière de ce qu’elle se remémore : la conscience, elle, retient ce passé, l’enroule sur lui-même au fur et à mesure que le temps se déroule, et prépare avec lui un avenir qu’elle contribuera à créer.

BERGSON
L’Énergie spirituelle

2009ESAMÉRIQUE DU NORDNORMALEL’histoire est pour l’espèce humaine ce que la raison est pour l’individu. Grâce à sa raison, l’homme n’est pas enfermé comme l’animal dans les limites étroites du présent visible ; il connaît encore le passé infiniment plus étendu, source du présent qui s’y rattache : c’est cette connaissance seule qui lui procure une intelligence plus nette du présent et lui permet même de formuler des inductions pour l’avenir. L’animal, au contraire, dont la connaissance sans réflexion est bornée à l’intuition, et par suite au présent, erre, même une fois apprivoisé, parmi les hommes, ignorant, engourdi, stupide, désarmé et esclave. De même un peuple qui ne connaît pas sa propre histoire est borné au présent de la génération actuelle : il ne comprend ni sa nature, ni sa propre existence, dans l’impossibilité où il est de les rapporter à un passé qui les explique ; il peut moins encore anticiper sur l’avenir. Seule l’histoire donne à un peuple une entière conscience de lui-même. L’histoire peut donc être regardée comme la conscience raisonnée de l’espèce humaine.

SCHOPENHAUER
Le Monde comme volonté et comme représentation

2009SANTILLESREMPLACEMENT(...) Radicale est la différence entre la conscience de l’animal, même le plus intelligent, et la conscience humaine. Car la conscience correspond exactement à la puissance de choix dont l’être vivant dispose ; elle est coextensive à la frange d’action possible qui entoure l’action réelle : conscience est synonyme d’invention et de liberté. Or, chez l’animal, l’invention n’est jamais qu’une variation sur le thème de la routine. Enfermé dans les habitudes de l’espèce, il arrive sans doute à les élargir par son initiative individuelle ; mais il n’échappe à l’automatisme que pour un instant, juste le temps de créer un automatisme nouveau : les portes de sa prison se referment aussitôt ouvertes ; en tirant sur sa chaîne il ne réussit qu’à l’allonger. Avec l’homme, la conscience brise la chaîne. Chez l’homme, et chez l’homme seulement, elle se libère.

BERGSON
L’Évolution créatrice.

2009LMÉTROPOLEREMPLACEMENTTelle saveur, tel parfum m’ont plu quand j’étais enfant, et me répugnent aujourd’hui. Pourtant je donne encore le même nom à la sensation éprouvée, et je parle comme si, le parfum et la saveur étant demeurés identiques, mes goûts seuls avaient changé. Je solidifie donc encore cette sensation ; et lorsque sa mobilité acquiert une telle évidence qu’il me devient impossible de la méconnaître, j’extrais cette mobilité pour lui donner un nom à part et la solidifier à son tour sous forme de goût. Mais en réalité il n’y a ni sensations identiques, ni goûts multiples ; car sensations et goûts m’apparaissent comme des choses dès que je les isole et que je les nomme, et il n’y a guère dans l’âme humaine que des progrès. Ce qu’il faut dire, c’est que toute sensation se modifie en se répétant, et que si elle ne me paraît pas changer du jour au lendemain, c’est parce que je l’aperçois maintenant à travers l’objet qui en est cause, à travers le mot qui la traduit. Cette influence du langage sur la sensation est plus profonde qu’on ne le pense généralement. Non seulement le langage nous fait croire à l’invariabilité de nos sensations, mais il nous trompera parfois sur le caractère de la sensation éprouvée. Ainsi, quand je mange d’un mets réputé exquis, le nom qu’il porte, gros de l’approbation qu’on lui donne, s’interpose entre ma sensation et ma conscience ; je pourrai croire que la saveur me plaît, alors qu’un léger effort d’attention me prouverait le contraire. Bref, le mot aux contours bien arrêtés, le mot brutal, qui emmagasine ce qu’il y a de stable, de commun et par conséquent d’impersonnel dans les impressions de l’humanité, écrase ou tout au moins recouvre les impressions délicates et fugitives de notre conscience individuelle. Pour lutter à armes égales, celles-ci devraient s’exprimer par des mots précis ; mais ces mots, à peine formés, se retourneraient contre la sensation qui leur donna naissance, et inventés pour témoigner que la sensation est instable, ils lui imposeraient leur propre stabilité.

BERGSON
Essai sur les données immédiates de la conscience

2009ESPOLYNÉSIENORMALEC’est la société qui trace à l’individu le programme de son existence quotidienne. On ne peut vivre en famille, exercer sa profession, vaquer aux mille soins de la vie journalière, faire ses ernplettes, se promener dans la rue ou même rester chez soi, sans obéir à des prescriptions et se plier à des obligations. Un choix s’impose à tout instant ; nous optons naturellement pour ce qui est conforme à la règle. C’est à peine si nous en avons conscience ; nous ne faisons aucun effort. Une route a été tracée par la société ; nous la trouvons ouverte devant nous et nous la suivons ; il faudrait plus d’initiative pour prendre à travers champs. Le devoir, ainsi entendu, s’accomplit presque toujours automatiquement ; et l’obéissance au devoir, si l’on s’en tenait au cas le plus fréquent, se définirait un laisser-aller ou un abandon. D’où vient donc que cette obéissance apparaît au contraire comme un état de tension, et le devoir lui-même comme une chose raide et dure ? C’est évidemment que des cas se présentent où l’obéissance implique un effort sur soi-même. Ces cas sont exceptionnels ; mais on les remarque, parce qu’une conscience intense les accompagne, comme il arrive pour toute hésitation ; à vrai dire, la conscience est cette hésitation même, l’acte qui se déclenche tout seul passant à peu près inaperçu.

BERGSON
Les deux Sources de la morale et de la religion.

2009SPOLYNÉSIENORMALELa conscience peut-elle nous cacher ce que nous sommes ?
2009LPOLYNÉSIEREMPLACEMENTIl est assez évident que l’idée du Moi se forme corrélativement à l’idée des autres ; que l’opposition la modifie tout autant que l’imitation ; que le langage, le nom propre, les jugements, les sentences, tout le bruit propre à la famille, y ont une puissance décisive ; qu’enfin c’est des autres que nous tenons la première connaissance de nous-mêmes. Quelle application de tous pour me rappeler à moi-même, pour m’incorporer mes actes et mes paroles, pour me raconter mes propres souvenirs ! La chronologie est toujours élaborée, discutée, contrôlée en commun ; j’apprends ma propre histoire ; tout ce qui est rêverie ou rêve est d’abord énergiquement nié par le bavardage quotidien ; ainsi mes premiers pas dans la connaissance de moi-même sont les plus assurés de tous. Aussi cette idée de moi individu, lié à d’autres, distinct des autres, connu par eux et jugé par eux comme je les connais et les juge, tient fortement tout mon être ; la conscience intime y trouve sa forme et son modèle ; ce n’est point une fiction de roman ; je suis toujours pour moi un être fait de l’opinion autour de moi ; cela ne m’est pas étranger ; c’est en moi ; l’existence sociale me tient par l’intérieur ; et, si l’on ne veut pas manquer une idée importante, il faut définir l’honneur comme le sentiment intérieur des sanctions extérieures.

ALAIN
Études

2010SANTILLESREMPLACEMENTSi nous considérons (...) la vie à son entrée dans le monde, nous la voyons apporter avec elle quelque chose qui tranche sur la matière brute. Le monde, laissé à lui-même, obéit à des lois fatales. Dans des conditions déterminées, la matière se comporte de façon déterminée, rien de ce qu’elle fait n’est imprévisible : si notre science était complète et notre puissance de calculer infinie, nous saurions par avance tout ce qui se passera dans l’univers matériel inorganisé, dans sa masse et dans ses éléments, comme nous prévoyons une éclipse de soleil ou de lune. Bref, la matière est inertie, géométrie, nécessité. Mais avec la vie apparaît le mouvement imprévisible et libre. L’être vivant choisit ou tend à choisir. Son rôle est de créer. Dans un monde où tout le reste est déterminé, une zone d’indétermination l’environne. Comme, pour créer l’avenir, il faut en préparer quelque chose dans le présent, comme la préparation de ce qui sera ne peut se faire que par l’utilisation de ce qui a été, la vie s’emploie dès le début à conserver le passé et à anticiper sur l’avenir dans une durée où passé, présent et avenir empiètent l’un sur l’autre et forment une continuité indivisée : cette mémoire et cette anticipation sont (...) la conscience même. Et c’est pourquoi, en droit sinon en fait, la conscience est coextensive à la vie.

BERGSON
L’Énergie spirituelle

2010ESJAPONNORMALETout vouloir procède d’un besoin, c’est-à-dire d’une privation, c’est-à-dire d’une souffrance. La satisfaction y met fin ; mais pour un désir qui est satisfait, dix au moins sont contrariés ; de plus, le désir est long, et ses exigences tendent à l’infini ; la satisfaction est courte, et elle est parcimonieusement mesurée. Mais ce contentement suprême n’est lui-même qu’apparent ; le désir satisfait fait place aussitôt à un nouveau désir : le premier est une déception reconnue, le second est une déception non encore reconnue. La satisfaction d’aucun souhait ne peut procurer de contentement durable et inaltérable. C’est comme l’aumône qu’on jette à un mendiant : elle lui sauve aujourd’hui la vie pour prolonger sa misère jusqu’à demain. Tant que notre conscience est remplie par notre volonté, tant que nous sommes asservis à l’impulsion du désir, aux espérances et aux craintes continuelles qu’il fait naître, tant que nous sommes sujets du vouloir, il n’y a pour nous ni bonheur durable, ni repos. Poursuivre ou fuir, craindre le malheur ou chercher la jouissance, c’est en réalité tout un ; l’inquiétude d’une volonté toujours exigeante, sous quelque forme qu’elle se manifeste, emplit et trouble sans cesse la conscience ; or sans repos le véritable bonheur est impossible.SCHOPENHAUER
Le Monde comme volonté et comme représentation.
2010SJAPONNORMALELa conscience de soi est-elle trompeuse ?
2010SLIBANNORMALETout animal a des idées puisqu’il a des sens, il combine même ses idées jusqu’à un certain point, et l’homme ne diffère à cet égard de la bête que du plus au moins. Quelques philosophes ont même avancé qu’il y a plus de différence de tel homme à tel homme que de tel homme à telle bête ; ce n’est donc pas tant l’entendement qui fait parmi les animaux la distinction spécifique de l’homme que sa qualité d’agent libre. La nature commande à tout animal, et la bête obéit. L’homme éprouve la même impression, mais il se reconnaît libre d’acquiescer, ou de résister ; et c’est surtout dans la conscience de cette liberté que se montre la spiritualité de son âme : car la physique explique en quelque manière le mécanisme des sens et la formation des idées ; mais dans la puissance de vouloir ou plutôt de choisir, et dans le sentiment de cette puissance on ne trouve que des actes spirituels, dont on n’explique rien par les lois de la mécanique.

ROUSSEAU
Discours sur l’origine de l’inégalité

2010ESMÉTROPOLENORMALELa morale de notre temps est fixée dans ses lignes essentielles, au moment où nous naissons ; les changements qu’elle subit au cours d’une existence individuelle, ceux, par conséquent, auxquels chacun de nous peut participer sont infiniment restreints. Car les grandes transformations morales supposent toujours beaucoup de temps. De plus, nous ne sommes qu’une des innombrables unités qui y collaborent. Notre apport personnel n’est donc jamais qu’un facteur infime de la résultante complexe dans laquelle il disparaît anonyme. Ainsi, on ne peut pas ne pas reconnaître que, si la règle morale est oeuvre collective, nous la recevons beaucoup plus que nous ne la faisons. Notre attitude est beaucoup plus passive qu’active. Nous sommes agis plus que nous n’agissons. Or, cette passivité est en contradiction avec une tendance actuelle, et qui devient tous les jours plus forte, de la conscience morale. En effet, un des axiomes fondamentaux de notre morale, on pourrait même dire l’axiome fondamental, c’est que la personne humaine est la chose sainte par excellence ; c’est qu’elle a droit au respect que le croyant de toutes les religions réserve à son dieu ; et c’est ce que nous exprimons nous-mêmes, quand nous faisons de l’idée d’humanité la fin et la raison d’être de la patrie. En vertu de ce principe, toute espèce d’empiètement sur notre for intérieur nous apparaît comme immorale, puisque c’est une violence faite à notre autonomie personnelle. Tout le monde, aujourd’hui, reconnaît, au moins en théorie, que jamais, en aucun cas, une manière déterminée de penser ne doit nous être imposée obligatoirement, fût-ce au nom d’une autorité morale.

DURKHEIM
L’Éducation morale

2010LPOLYNÉSIENORMALELa conscience est-elle source d’illusions ?
2011SLIBANNORMALEnous procure (...) l’expérience de la vie réelle, nous transporte dans des situations que notre expérience personnelle ne nous fait pas et ne nous fera peut-être jamais connaître : les expériences des personnes qu’il représente, et, grâce à la part que nous prenons à ce qui arrive à ces personnes, nous devenons capables de ressentir plus profondément ce qui se passe en nous-même. D’une façon générale, le but de l’art consiste à rendre accessible à l’intuition ce qui existe dans l’esprit humain, la vérité que l’homme abrite dans son esprit, ce qui remue la poitrine humaine et agite l’esprit humain. C’est ce que l’art a pour tâche de représenter, et il le fait au moyen de l’apparence qui, comme telle, nous est indifférente, dès l’instant où elle sert à éveiller en nous le sentiment et la conscience de quelque chose de plus élevé. C’est ainsi que l’art renseigne l’homme sur l’humain, éveille des sentiments endormis, nous met en présence des vrais intérêts de l’esprit. Nous voyons ainsi que l’art agit en remuant, dans leur profondeur, leur richesse et leur variété, tous les sentiments qui s’agitent dans l’âme humaine, et en intégrant dans le champ de notre expérience ce qui se passe dans les régions intimes de cette âme. "Rien de ce qui est humain ne m’est étranger" : telle est la devise qu’on peut appliquer à l’art.

HEGEL
Esthétique

2012LAMÉRIQUE DU SUDNORMALELa conscience fait-elle le malheur de l’homme ?
2012SANTILLESREMPLACEMENTEst moral, peut-on dire, tout ce qui est source de solidarité, tout ce qui force l’homme à compter avec autrui, à régler ses mouvements sur autre chose que les impulsions de son égoïsme, et la moralité est d’autant plus solide que ces liens sont plus nombreux et plus forts. On voit combien il est inexact de la définir, comme on a fait souvent, par la liberté ; elle consiste bien plutôt dans un état de dépendance. Loin qu’elle serve à émanciper l’individu, à le dégager du milieu qui l’enveloppe, elle a, au contraire, pour fonction essentielle d’en faire la partie intégrante d’un tout et, par conséquent, de lui enlever quelque chose de la liberté de ses mouvements. On rencontre parfois, il est vrai, des âmes qui ne sont pas sans noblesse et qui, pourtant, trouvent intolérable l’idée de cette dépendance. Mais c’est qu’elles n’aperçoivent pas les sources d’où découle leur propre moralité, parce que ces sources sont trop profondes. La conscience est un mauvais juge de ce qui se passe au fond de l’être, parce qu’elle n’y pénètre pas.La société n’est donc pas, comme on l’a cru souvent, un évènement étranger à la morale ou qui n’a sur elle que des répercussions secondaires ; c’en est, au contraire, la condition nécessaire. Elle n’est pas une simple juxtaposition d’individus qui apportent, en y entrant, une moralité intrinsèque ; mais l’homme n’est un être moral que parce qu’il vit en société, puisque la moralité consiste à être solidaire d’un groupe et varie comme cette solidarité. Faites évanouir toute vie sociale, et la vie morale s’évanouit du même coup, n’ayant plus d’objet où se prendre.

DURKHEIM
De la Division du travail social

2012LLA RÉUNIONNORMALEChacun de nous a sa manière d’aimer et de haïr, et cet amour, cette haine, reflètent sa personnalité tout entière. Cependant le langage désigne ces états par les mêmes mots chez tous les hommes ; aussi n’a-t-il pu fixer que l’aspect objectif et impersonnel de l’amour, de la haine, et des mille sentiments qui agitent l’âme. Nous jugeons du talent d’un romancier à la puissance avec laquelle il tire du domaine public, où le langage les avait ainsi fait descendre, des sentiments et des idées auxquels il essaie de rendre, par une multiplicité de détails qui se juxtaposent, leur primitive et vivante individualité. Mais de même qu’on pourra intercaler indéfiniment des points entre deux positions d’un mobile sans jamais combler l’espace parcouru, ainsi, par cela seul que nous parlons, par cela seul que nous associons des idées les unes aux autres et que ces idées se juxtaposent au lieu de se pénétrer, nous échouons à traduire entièrement ce que notre âme ressent : la pensée demeure incommensurable avec le langage.

BERGSON
Essai sur les données immédiates de la conscience

2012SLIBANNORMALEOn ne désire en réalité qu’une chose : le bonheur. Toute chose qu’on désire autrement qu’à titre de moyen conduisant à quelque but éloigné, et en définitive au bonheur, est désirée comme une partie même du bonheur et n’est pas désirée pour elle-même tant qu’elle n’est pas devenue une partie du bonheur. Ceux qui désirent la vertu pour elle-même la désirent, soit parce que la conscience de la posséder est un plaisir, soit parce que la conscience d’en être dépourvu est une peine, soit pour les deux raisons réunies ; car, à vrai dire, le plaisir et la peine en ce cas existent rarement séparés, mais se présentent presque toujours ensemble, la même personne éprouvant le plaisir d’avoir atteint un certain degré de vertu et la peine de ne pas s’être élevé plus haut. Si elle n’éprouvait ni ce plaisir, ni cette peine, c’est qu’elle n’aimerait pas ou ne désirerait pas la vertu, ou la désirerait seulement pour les autres avantages qu’elle pourrait lui apporter, soit à elle-même, soit aux personnes auxquelles elle tient.

MILL
L’Utilitarisme

2012LNOUVELLE-CALÉDONIENORMALECelui qui pourrait regarder à l’intérieur d’un cerveau en pleine activité, suivre le va-et-vient des atomes et interpréter tout ce qu’ils font, celui-là saurait sans doute quelque chose de ce qui se passe dans l’esprit, mais il n’en saurait que peu de chose. Il en connaîtrait tout juste ce qui est exprimable en gestes, attitudes et mouvements du corps, ce que l’état d’âme contient d’action en voie d’accomplissement, ou simplement naissante : le reste lui échapperait. Il serait, vis-à-vis des pensées et des sentiments qui se déroulent à l’intérieur de la conscience, dans la situation du spectateur qui voit distinctement tout ce que les acteurs font sur la scène, mais n’entend pas un mot de ce qu’ils disent. Sans doute, le va-et-vient des acteurs, leurs gestes et leurs attitudes, ont leur raison d’être dans la pièce qu’ils jouent ; et si nous connaissons le texte, nous pouvons prévoir à peu près le geste ; mais la réciproque n’est pas vraie, et la connaissance des gestes ne nous renseigne que fort peu sur la pièce, parce qu’il y a beaucoup plus dans une fine comédie que les mouvements par lesquels on la scande. Ainsi, je crois que si notre science du mécanisme cérébral était parfaite, et parfaite aussi notre psychologie, nous pourrions deviner ce qui se passe dans le cerveau pour un état d’âme déterminé ; mais l’opération inverse serait impossible, parce que nous aurions le choix, pour un même état du cerveau, entre une foule d’états d’âme différents, également appropriés.

BERGSON
L’Énergie spirituelle

2012SPOLYNÉSIENORMALELorsque les objets attirent notre attention, les perceptions qu’ils occasionnent en nous se lient avec le sentiment de notre être et avec tout ce qui peut y avoir quelque rapport. De là il arrive que non seulement la conscience nous donne connaissance de nos perceptions, mais encore, si elles se répètent, elle nous avertit souvent que nous les avons déjà eues, et nous les fait connaître comme étant à nous, ou comme affectant, malgré leur variété et leur succession, un être qui est constamment le même nous. La conscience, considérée par rapport à ces nouveaux effets, est une nouvelle opération qui nous sert à chaque instant et qui est le fondement de l’expérience. Sans elle, chaque moment de la vie nous paraît le premier de notre existence, et notre connaissance ne s’étendrait jamais au-delà d’une première perception.Il est évident que si la liaison qui est entre les perceptions que j’éprouve actuellement, celles que j’éprouvai hier, et le sentiment de mon être, était détruite, je ne saurais reconnaître que ce qui m’est arrivé hier soit arrivé à moi-même. Si à chaque nuit cette liaison était interrompue, je commencerais pour ainsi dire chaque jour une nouvelle vie, et personne ne pourrait me convaincre que le moi d’aujourd’hui fût le moi de la veille.CONDILLAC
Essai sur l’origine des connaissances humaines
2013ESNOUVELLE-CALÉDONIENORMALEA mesure que s’accroît sa puissance, une communauté accorde moins d’importance aux délits de ses membres, parce qu’ils lui semblent moins subversifs et moins dangereux qu’auparavant pour la survivance de l’ensemble : le malfaiteur n’est plus "banni", chassé, la colère de tous n’a plus le droit de se déchaîner contre lui aussi librement qu’autrefois, - au contraire il est désormais protégé et défendu par la communauté contre cette colère et notamment contre celle des personnes qui ont subi le préjudice. Le compromis avec la colère de ceux qui ont été immédiatement touchés par le méfait ; l’effort pour localiser l’incident, voire pour prévenir l’extension ou la généralisation de l’effervescence ; la recherche d’équivalents pour régler toute l’affaire ; la volonté surtout, qui se fait de plus en plus pressante, de considérer que toute infraction peut de quelque manière être rachetée, donc de séparer, du moins jusqu’à un certain point, le criminel de son action - voilà les traits qui marquent de plus en plus nettement l’évolution ultérieure du droit pénal. Plus la puissance et la conscience de soi d’une communauté augmentent, plus le droit pénal s’adoucit ; tout affaiblissement et tout péril font réapparaître les formes plus sévères de ce droit.NIETZSCHE
Généalogie de la morale, 1887
2014SANTILLESNORMALEQuoi que ce soit qui fasse un homme aux yeux de certains hommes, et par conséquent l’identité d’un individu humain, sur quoi peut-être peu seront d’accord, nous ne pourrons situer l’identité personnelle nulle part ailleurs que dans la conscience (qui est la seule chose qui fait ce que nous appelons soi) sans nous trouver embarqués dans de grandes absurdités.Mais un homme saoul et un homme dessaoulé ne sont-ils pas la même personne ? Sinon, pourquoi un homme est-il puni pour ce qu’il a commis quand il était saoul, même s’il n’en a plus eu conscience ensuite ? C’est la même personne dans l’exacte mesure où un homme qui marche et fait d’autres choses encore pendant son sommeil est la même personne, et est responsable de tout dommage causé alors. Dans les deux cas, les lois humaines punissent selon une justice qui dépend de ce qu’elles peuvent connaître : ne pouvant dans des cas de ce genre distinguer avec certitude ce qui est vrai et ce qui est feint, elles ne peuvent admettre comme défense valable l’ignorance due à l’ivresse ou au sommeil. Car bien que le châtiment soit attaché à la personnalité, et la personnalité à la conscience, et que peut-être l’ivrogne n’ait pas conscience de ce qu’il a fait, les tribunaux humains cependant le punissent à bon droit, parce que contre lui il y a la preuve du fait, tandis qu’en sa faveur il ne peut y avoir la preuve du manque de conscience.LOCKE
Essai philosophique concernant l’entendement humain (1690)
2014ESANTILLESREMPLACEMENTLa conscience fait-elle de moi ce que je suis ?
2014TMDGROUPEMENTS I-IVNORMALELe sentiment d’un tribunal intérieur inscrit en l’homme ("devant lequel ses pensées s’accusent ou se disculpent l’une l’autre") correspond à la conscience morale.Tout homme a une telle conscience et se trouve observé, menacé et, en général, tenu en respect (un respect lié à la crainte) par un juge intérieur, et cette puissance qui, en lui, veille sur les lois n’est pas quelque chose qu’il se forge lui-même (arbitrairement), mais elle est incorporée dans son être. Elle le suit comme son ombre s’il songe à lui échapper. Il peut certes par des plaisirs et des distractions se rendre insensible ou s’endormir, mais il ne peut éviter par la suite de revenir à soi-même ou de se réveiller dès qu’il perçoit la voix terrible de cette conscience. Au demeurant peut-il en arriver à l’extrême infamie où il ne se préoccupe plus du tout de cette voix, mais il ne peut du moins éviter de l’entendre.KANT
Doctrine de la vertu (1795)
QUESTIONS :
1° Dégagez la thèse de ce texte et montrez comment elle est établie.2° En vous appuyant sur des exemplesa) analysez l’image du "tribunal intérieur" ;b) expliquez : "elle est incorporée dans son être" ;c) expliquez : "il ne peut éviter par la suite de revenir à soi-même ou de se réveiller" ;d) expliquez en quoi même quand "il ne se préoccupe plus du tout de cette voix", "il ne peut (...) éviter de l’entendre".3° La voix de la conscience morale se fait-elle toujours entendre ?
2014ESLIBANNORMALE
2014ESMÉTROPOLEREMPLACEMENTL’usage de la raison individuelle suppose, à titre de condition indispensable, le langage ; l’écriture n’est pas moins nécessaire à l’exercice de cette raison de l’humanité : c’est avec elle seulement que commence l’existence réelle de cette raison, comme celle de la raison individuelle ne commence qu’avec la parole. L’écriture, en effet, sert à rétablir l’unité dans cette conscience du genre humain brisée et morcelée sans cesse par la mort : elle permet à l’arrière-neveu de reprendre et d’épuiser la pensée conçue par l’aïeul ; elle remédie à la dissolution du genre humain et de sa conscience en un nombre infini d’individus éphémères, et elle brave ainsi le temps qui s’envole dans une fuite irrésistible avec l’oubli, son compagnon. Les monuments de pierre ne servent pas moins à cette fin que les monuments écrits, et leur sont en partie antérieurs. Croira-t-on en effet que les hommes qui ont dépensé des sommes infinies, qui ont mis en mouvement les forces de milliers de bras, durant de longues années, pour construire ces pyramides, ces monolithes, ces tombeaux creusés dans le roc, ces obélisques, ces temples et ces palais, debout depuis des millénaires déjà, n’aient eu en vue que leur propre satisfaction, le court espace d’une vie, qui ne suffisait pas à leur faire voir la fin de ces travaux, ou encore le but ostensible que la grossièreté de la foule les obligeait à alléguer ? - Leur intention véritable, n’en doutons pas, était de parler à la postérité la plus reculée, d’entrer en rapport avec elle et de rétablir ainsi l’unité de la conscience humaine.

SCHOPENHAUER
Le Monde comme volonté et comme représentation (1819)

2015ESMÉTROPOLENORMALELa conscience de l’individu n’est-elle que le reflet de la société à laquelle il appartient ?
2016ESJAPONNORMALEY a-t-il un homme, même moyennement honnête, à qui il ne soit parfois arrivé de renoncer à un mensonge, par ailleurs inoffensif, par lequel il pouvait se tirer lui-même d’un mauvais pas, ou bien même rendre service à un ami cher et méritant, uniquement pour pouvoir ne pas se rendre secrètement méprisable à ses propres yeux ? L’honnête homme frappé par un grand malheur qu’il aurait pu éviter, s’il avait seulement pu manquer à son devoir, n’est- il pas soutenu par la conscience d’avoir maintenu et honoré en sa personne la dignité propre à l’humanité, de n’avoir pas à rougir de lui-même et de ne pas redouter le regard interne de l’examen de conscience ? Cette consolation n’est pas le bonheur, elle n’en est pas même la plus petite partie. Nul, en effet, ne souhaitera l’occasion de l’éprouver, ni peut-être même ne désirerait la vie à ces conditions ; mais il vit, et ne peut supporter d’être à ses propres yeux indigne de la vie. Cet apaisement intérieur est donc purement négatif, par rapport à tout ce qui peut rendre la vie agréable ; il consiste en effet à écarter le danger de décliner en valeur personnelle, alors qu’on a déjà renoncé entièrement à celle de sa situation. Il est l’effet d’un respect pour quelque chose de bien différent de la vie, et auprès duquel au contraire la vie, avec tout ce qu’elle a d’agréable, n’a en comparaison et en opposition aucune valeur. L’homme dont nous parlions ne vit plus que par devoir, et non parce qu’il trouve le moindre goût à la vie.

KANT
Critique de la raison pratique, 1788.

2016TMDMÉTROPOLENORMALELa conscience fait-elle obstacle à notre bonheur ?
2017LAMÉRIQUE DU NORDREMPLACEMENTNous voulons savoir en vertu de quelle raison nous nous sommes décidés, et nous trouvons que nous nous sommes décidés sans raison, peut-être même contre toute raison. Mais c’est là précisément, dans certains cas, la meilleure des raisons. Car l’action accomplie n’exprime plus alors telle idée superficielle, presque extérieure à nous, distincte et facile à exprimer : elle répond à l’ensemble de nos sentiments, de nos pensées et de nos aspirations les plus intimes, à cette conception particulière de la vie qui est l’équivalent de toute notre expérience passée, bref, à notre idée personnelle du bonheur et de l’honneur. Aussi a-t-on eu tort, pour prouver que l’homme est capable de choisir sans motif, d’aller chercher des exemples dans les circonstances ordinaires et même indifférentes de la vie. On montrerait sans peine que ces actions insignifiantes sont liées à quelque motif déterminant. C’est dans les circonstances solennelles, lorsqu’il s’agit de l’opinion que nous donnerons de nous aux autres et surtout à nous-mêmes, que nous choisissons en dépit de ce qu’on est convenu d’appeler un motif ; et cette absence de toute raison tangible est d’autant plus frappante que nous sommes plus profondément libres.

BERGSON
Essai sur les données immédiates de la conscience. 1889

2017SÉTRANGER GROUPE 1NORMALECelui qui pourrait regarder à l’intérieur d’un cerveau en pleine activité, suivre le va-et-vient des atomes et interpréter tout ce qu’ils font, celui-là saurait sans doute quelque chose. Il en connaîtrait tout juste ce qui est exprimable en gestes, attitudes et mouvements du corps, ce que l’état d’âme contient d’action en voie d’accomplissement, ou simplement naissante : le reste lui échapperait. Il serait, vis-à- vis des pensées et des sentiments qui se déroulent à l’intérieur de la conscience, dans la situation du spectateur qui voit distinctement tout ce que les acteurs font sur la scène, mais n’entend pas un mot de ce qu’ils disent. Sans doute, le va-et-vient des acteurs, leurs gestes et leurs attitudes, ont leur raison d’être dans la pièce qu’ils jouent ; et si nous connaissons le texte, nous pouvons prévoir à peu près le geste ; mais la réciproque n’est pas vraie, et la connaissance des gestes ne nous renseigne que fort peu sur la pièce, parce qu’il y a beaucoup plus dans une fine comédie que les mouvements par lesquels on la scande. Ainsi, je crois que si notre science du mécanisme cérébral était parfaite, et parfaite aussi notre psychologie, nous pourrions deviner ce qui se passe dans le cerveau pour un état d’âme déterminé ; mais l’opération inverse serait impossible, parce que nous aurions le choix, pour un même état du cerveau, entre une foule d’états d’âme différents, également appropriés.

BERGSON
L’Énergie spirituelle (1912)

2017SJAPONNORMALELe cerveau sert à effectuer ce choix : il actualise les souvenirs utiles, il maintient dans le sous-sol de la conscience ceux qui ne serviraient à rien. On en dirait autant de la perception. Auxiliaire de l’action, elle isole, dans l’ensemble de la réalité, ce qui nous intéresse ; elle nous montre moins les choses mêmes que le parti que nous en pouvons tirer. Par avance elle les classe, par avance elle les étiquette ; nous regardons à peine l’objet, il nous suffit de savoir à quelle catégorie il appartient. Mais, de loin en loin, par un accident heureux, des hommes surgissent dont les sens ou la conscience sont moins adhérents à la vie. La nature a oublié d’attacher leur faculté de percevoir à leur faculté d’agir. Quand ils regardent une chose, ils la voient pour elle, et non plus pour eux. Ils ne perçoivent plus simplement en vue d’agir ; ils perçoivent pour percevoir, - pour rien, pour le plaisir. Par un certain côté d’eux- mêmes, soit par leur conscience soit par un de leurs sens, ils naissent détachés ; et, selon que ce détachement est celui de tel ou tel sens, ou de la conscience, ils sont peintres ou sculpteurs, musiciens ou poètes. C’est donc bien une vision plus directe de la réalité que nous trouvons dans les différents arts ; et c’est parce que l’artiste songe moins à utiliser sa perception qu’il perçoit un plus grand nombre de choses.

BERGSON
La pensée et le mouvant

2017ESLIBANNORMALEQu’arrive-t-il quand une de nos actions cesse d’être spontanée pour devenir automatique ? La conscience s’en retire. Dans l’apprentissage d’un exercice, par exemple, nous commençons par être conscients de chacun des mouvements que nous exécutons, parce qu’il vient de nous, parce qu’il résulte d’une décision et implique un choix ; puis, à mesure que ces mouvements s’enchaînent davantage entre eux et se déterminent plus mécaniquement les uns les autres, nous dispensant ainsi de nous décider et de choisir, la conscience que nous en avons diminue et disparaît. Quels sont, d’autre part, les moments où notre conscience atteint le plus de vivacité ? Ne sont-ce pas les moments de crise intérieure, où nous hésitons entre deux ou plusieurs partis à prendre, où nous sentons que notre avenir sera ce que nous l’aurons fait ? Les variations d’intensité de notre conscience semblent donc bien correspondre à la somme plus ou moins considérable de choix ou, si vous voulez, de création, que nous distribuons sur notre conduite. Tout porte à croire qu’il en est ainsi de la conscience en général.

BERGSON
L’énergie spirituelle, 1919

2017TMDMÉTROPOLENORMALELa conscience peut-elle nous cacher ce que nous sommes ?
2018LAMÉRIQUE DU NORDNORMALENous ne vivons pas d’abord dans la conscience de nous-même – ni même d’ailleurs dans la conscience des choses – mais dans l’expérience d’autrui. Jamais nous ne nous sentons exister qu’après avoir déjà pris contact avec les autres, et notre réflexion est toujours un retour à nous-même, qui doit d’ailleurs beaucoup à notre fréquentation d’autrui. Un nourrisson de quelques mois est déjà fort habile à distinguer la bienveillance, la colère, la peur sur le visage d’autrui, à un moment où il ne saurait avoir appris par l’examen de son propre corps les signes physiques de ces émotions. C’est donc que le corps d’autrui, dans ses diverses gesticulations, lui apparaît investi d’emblée d’une signification émotionnelle, c’est donc qu’il apprend à connaître l’esprit tout autant comme comportement visible que dans l’intimité de son propre esprit. Et l’adulte lui-même découvre dans sa propre vie ce que sa culture, l’enseignement, les livres, la tradition lui ont appris à y voir. Le contact de nous- même avec nous-même se fait toujours à travers une culture, au moins à travers un langage que nous avons reçu du dehors et qui nous oriente dans la connaissance de nous-même. Si bien qu’enfin le pur soi, l’esprit, sans instruments et sans histoire, s’il est bien comme une instance critique que nous opposons à la pure et simple intrusion des idées qui nous sont suggérées par le milieu, ne s’accomplit en liberté effective que par l’instrument du langage et en participant à la vie du monde.

MERLEAU-PONTY
Causeries (1948)

2018LANTILLESNORMALEC’est à travers ses actions, et non dans la jouissance, que l’homme ressent sa vie. Plus nous sommes occupés, plus ce sentiment est fort, et plus nous sommes conscients de notre vie. Dans l’oisiveté, nous ressentons au contraire la fugacité de la vie ; plus encore, nous avons l’impression de ne pas être vivants. L’activité contribue donc à l’entretien de notre vie. Le temps, lorsqu’il est vide, nous déplaît. Qu’est-ce qui cependant rend le temps agréable à nos yeux ? Les jouissances de la vie ne remplissent pas le temps, mais le laissent vide, et devant ce vide l’esprit humain éprouve de l’aversion, de la morosité et du dégoût. Le moment présent peut sans doute nous paraître rempli, mais si nous ne l’occupons qu’avec des jeux, etc., cette apparence de plénitude ne dure pas plus longtemps que le moment présent lui-même ; à notre souvenir, ce moment semble vide. Celui qui n’a rien fait d’autre dans la vie que de gaspiller son temps et qui jette un regard en arrière sur son existence, est toujours surpris de voir qu’il est si rapidement parvenu à la fin de ses jours ; il se demande comment cela se peut, car il n’a rien accompli. Seules nos actions remplissent le temps. Ce n’est que dans nos occupations que nous nous sentons vivre, alors que la jouissance, elle, nous laisse une impression d’insuffisance, car la vie est essentiellement la faculté de l’activité spontanée et le sentiment de toutes nos forces humaines. L’occupation est ce qui éveille la conscience de nos forces ; plus nous sentons celles-ci, plus nous sentons que nous sommes vivants.

KANT
Leçons d’éthique

2018LJAPONNORMALELes lois de la conscience, dont nous disons qu’elles naissent naturellement, naissent de la coutume : chacun ayant en intime vénération les opinions et les mœurs approuvées et admises autour de lui ne peut s’en détacher sans remords ni s’y appliquer sans contentement.Quand les Crétois, au temps passé, voulaient maudire quelqu’un, ils priaient les dieux de l’engager dans quelque mauvaise habitude.Mais le principal effet de la puissance de la coutume, c’est de nous saisir et de nous prendre dans ses serres de telle sorte qu’il nous soit difficilement possible de nous dégager de sa prise et de rentrer en nous pour réfléchir et soumettre ses prescriptions au raisonnement. En vérité, parce que nous les absorbons avec le lait de notre naissance et que le visage du monde se présente dans cet état à notre première vue, il semble que nous soyons nés à suivre ce train-là. Et les opinions courantes, que nous trouvons en crédit autour de nous (1), et qui sont infusées en notre âme par la semence de nos pères, il semble que ce soit les opinions générales et naturelles.Par là il arrive que ce qui est hors des gonds de la coutume, on le croit hors des gonds de la raison : Dieu sait combien il est déraisonnable de croire cela le plus souvent. Si, comme nous, qui nous étudions, avons appris à le faire, chaque homme qui entend une pensée juste regardait sur le champ par où elle le concerne directement, il trouverait qu’elle n’est pas tant un bon mot qu’un bon coup de fouet à la bêtise ordinaire de son jugement.

MONTAIGNE
Les Essais, 1580

(1) « que nous trouvons en crédit autour de nous » : qui sont communément admises

2018SLIBANNORMALENous sommes libres quand nos actes émanent de notre personnalité entière, quand ils l’expriment, quand ils ont avec elle cette indéfinissable ressemblance qu’on trouve parfois entre l’œuvre et l’artiste. En vain on alléguera(1) que nous cédons alors à l’influence toute-puissante de notre caractère. Notre caractère, c’est encore nous ; et parce qu’on s’est plu à scinder la personne en deux parties pour considérer tour à tour, par un effort d’abstraction, le moi qui sent ou pense et le moi qui agit, il y aurait quelque puérilité à conclure que l’un des deux moi pèse sur l’autre. Le même reproche s’adressera à ceux qui demandent si nous sommes libres de modifier notre caractère. Certes, notre caractère se modifie insensiblement tous les jours, et notre liberté en souffrirait, si ces acquisitions nouvelles venaient se greffer sur notre moi et non pas se fondre en lui. Mais, dès que cette fusion aura lieu, on devra dire que le changement survenu dans notre caractère est bien nôtre, que nous nous le sommes approprié. En un mot, si l’on convient d’appeler libre tout acte qui émane du moi, et du moi seulement, l’acte qui porte la marque de notre personne est véritablement libre, car notre moi seul en revendiquera la paternité.

BERGSON
Essai sur les données immédiates de la conscience (1889)

(1) « alléguer » : prétendre

2018ESPOLYNÉSIEREMPLACEMENTLa conscience implique-t-elle la maîtrise de soi ?
2019ESMÉTROPOLENORMALENous avons le libre arbitre, non pas quand nous percevons, mais quand nous agissons. Il ne dépend pas de mon arbitre de trouver le miel doux ou amer, mais il ne dépend pas non plus de mon arbitre qu’un théorème proposé m’apparaisse vrai ou faux ; la conscience n’a qu’à examiner ce qui lui apparaît. Lorsque nous décidons de quelque chose, nous avons toujours présentes à l’esprit ou bien une sensation ou une raison actuelles, ou tout au moins un souvenir actuel d’une sensation ou d’une raison passées ; bien qu’en ce dernier cas nous soyons souvent trompés par l’infidélité de la mémoire ou par l’insuffisance de l’attention. Mais la conscience de ce qui est présent ou de ce qui est passé ne dépend nullement de notre arbitre. Nous ne reconnaissons à la volonté que le pouvoir de commander à l’attention et à l’intérêt ; et ainsi, quoiqu’elle ne fasse pas le jugement en nous, elle peut toutefois y exercer une influence indirecte. Ainsi il arrive souvent que les hommes finissent par croire ce qu’ils voudraient être la vérité, ayant accoutumé leur esprit à considérer avec le plus d’attention les choses qu’ils aiment ; de cette façon ils arrivent à contenter non seulement leur volonté mais encore leur conscience.

LEIBNIZ
Remarques sur la partie générale des Principes de Descartes (1692)

2019TMDMÉTROPOLENORMALEIl y a un caractère commun à toutes les actions que l’on appelle communément morales, c’est qu’elles sont toutes conformes à des règles préétablies. Se conduire moralement, c’est agir suivant une norme, déterminant la conduite à tenir dans le cas donné avant même que nous n’ayons été nécessités1 à prendre parti. Le domaine de la morale, c’est le domaine du devoir, et le devoir, c’est une action prescrite. Ce n’est pas que des questions ne puissent se poser pour la conscience morale ; nous savons même qu’elle est souvent embarrassée, qu’elle hésite entre des partis contraires. Seulement, ce qu’il s’agit alors de savoir, c’est quelle est la règle particulière qui s’applique à la situation donnée, et comment elle doit s’y appliquer. Car, comme toute règle consiste en une prescription générale, elle ne peut pas s’appliquer exactement et mécaniquement de la même manière, dans chaque circonstance particulière. C’est à l’agent moral qu’il appartient de voir comment il convient de la particulariser. Il y a toujours là une marge laissée à son initiative ; mais cette marge est restreinte. L’essentiel de la conduite est déterminé par la règle.

ÉmileDURKHEIM
L’éducation morale (1903)

Pour expliquer ce texte ce texte, vous répondrez aux questions suivantes, qui sont destinées principalement à guider votre rédaction. Elles ne sont pas indépendantes les unes des autres et demandent que le texte soit d’abord étudié dans son ensemble.
1. Dégagez l’idée principale du texte et les étapes du raisonnement.
2. Expliquez :1. a) « Le domaine de la morale […] une action prescrite. » L. 5 - 6.
2. b) « ce qu’il s’agit alors de savoir […] et comment elle doit s’y appliquer. » L. 8 - 10.
3. c) « mais cette marge est restreinte. » L. 14.
3. La conduite morale est-elle entièrement déterminée par des règles préétablies ?