La philosophie dans l’académie de CRETEIL
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ATGET et les séries des petits métiers. Clarifier le sens de " répétition"

Travail, temps et répétition

  • Montrer la présence de cette thématique dans l’oeuvre d’ATGET
  • De quelle répétition s’inspire ce travail photographique ?
  • Dégager les différents niveaux de sens de la "répétition".
    C’est avec la représentation des petits métiers qu’Atget va constituer une première série conséquente. Il commence cette petite suite de prises de vue en restituant une vision élargie de la place Saint-Médard avant de resserrer son cadrage sur les petits métiers ambulants. Ce mouvement lui permet aussi d’expérimenter plusieurs types de représentations. D’une part Atget montre l’activité de ces marchands en leur faisant jouer une scène de rue (les personnages miment une action), d’autre part en isolant certains petits métiers, Atget se place dans la tradition de la représentation gravée des Cris de Paris gravés par Edme Bouchardon ou Carl Vernet. Pris en légère plongée, arrêtés, les corps des marchands sont intégrés dans une composition structurée par les lignes de fuites que dessinent les pavés et les trottoirs parisiens. Mais ce sont surtout les configurations originales des marchandises qu’ils portent à même le corps qui les distinguent du reste de la série (BNF : http://classes.bnf.fr/atget/feuille/03.htm )

LE DECLIN DE L’AURA Walter Benjamin
« …La crise liée à la reproduction des œuvres d’art n’est qu’un aspect d’une crise plus générale, qui concerne la perception elle-même. Ce qui rend insatiable le plaisir qu’on prend aux belles choses, c’est l’image d’un monde antérieur, celui que Baudelaire présente comme voilé par les larmes de la nostalgie. Si le poète rêve qu’en des temps révolus telle femme fut sa sœur ou son épouse, - cet aveu est le tribut que le beau en tant que tel, peut exiger. Dans quelque mesure que l’art vise le beau et si simplement même qu’il le rende, c’est du fond même des temps (comme Faust évoque Hélène) qu’il le fait surgir. Rien de tel dans les reproductions techniques (le beau n’y trouve aucune place). Lorsque Proust constate l’insuffisance, le manque de profondeur des images de Venise que lui fournit la mémoire volontaire, c’est le mot d’ « instantané » qui lui vient aussitôt à l’idée, et ce seul mot suffit à rendre Venise « ennuyeuse comme une exposition de photographie ». Si l’on admet que les images surgies de la mémoire involontaire se distinguent des autres parce qu’elles possèdent une aura, il est clair que dans le phénomène que l’on appelle le « déclin de l’aura », la photographie aura joué un rôle décisif Ce qui devait paraître inhumain, on pourrait même dire mortel, dans le daguerréotype, c’est qu’il forçait à regarder (longuement d’ailleurs) un appareil qui recevait l’image de l’homme sans lui rendre son regard. Car il n’est point de regard qui n’attende une réponse de l’être auquel il s’adresse. Que cette attente soit comblée (par une pensée, par un effort volontaire d’attention, tout aussi bien que par un regard au sens étroit du terme), l’expérience de l’aura connaît alors sa plénitude. Quand Novalis écrit que « la perceptibilité est l’attention », il songe à celle de l’aura. L’expérience de l’aura repose donc sur le transfert, au niveau des rapports entre l’inanimé– ou la nature – et l’homme, d’une forme de réaction courante dans la société humaine. Dès qu’on est regardé – ou qu’on se croit regardé, on lève les yeux. Sentir l’aura d’une chose, c’est lui conférer le pouvoir de lever les yeux. »
Walter Benjamin, Charles Baudelaire. Un poète lyrique à l’apogée du capitalisme, trad. Jean Lacoste, Payot, 1982, p. 199-200